Elle par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Michèle femme très autoritaire, mène son entreprise de jeux vidéos avec une énergie hors du commun. Pourtant les choses ne deviennent pas très simples dans son existence trépidante. Un homme réussit à s'introduire à son domicile et la viole. Cette femme jusqu'ici très sûre d'elle se laisse envahir par une profonde paranoïa et se met à suspecter des personnes de son entourage et des collègues de travail. Pourtant elle ne porte pas plainte auprès des autorités, préférant dévoiler cette affaire au cours d'un repas entre amis proches. La stupéfaction de l'assemblée est totale. Néanmoins Michèle reste droite dans ses bottes, quitte à risquer d'autres assauts du mystérieux violeur...


Notre chef d'entreprise a vécu dans un milieu familial très spécial et, il faut bien l'avouer, très déconcertant. Elle n'a d'empathie pour personne, détestant sa mère, indifférente à son fils et son ex-compagnon. Voici donc certainement la résultante du comportement de cette femme vivant dans un grand appartement seule avec son chat. Michèle cherche sans cesse à transmettre sa rancœur sur sa famille bien sûr mais aussi sur ses collègues de travail et sur ses amis, entre autres sur Anna sa meilleure copine sans cesse humiliée.
Michèle semble avoir certes un fort caractère mais sa vie de femme repose sur une forme de dédain envers autrui et sur des fantasmes sexuels tous aussi surprenants les uns que les autres. "Elle" aime prendre du plaisir à humilier et parfois à observer certains hommes en se créant du plaisir. Michèle ne dénonce pas le violeur, elle l'attend peut-être même par besoin de sensation forte mélangée à un instinct de vengeance. Michèle engage sa vie dans cette affaire mais qu'importe, elle se joue de ce bourreau, c'est en fait lui son principal défouloir.


Paul Verhoeven réalise ici un film que l'on qualifie de "thriller". Néanmoins si effectivement l'intrigue nous mène vers ce genre de style, je pense que ce n'est qu'un prétexte pour nous brosser un portrait très particulier d'une femme dont le tempérament est ancré dans les profondeurs de son environnement familial. En effet ce fameux "thriller" paraît assez convenu et prévisible. Par contre il fait ressortir à merveille Michèle, prisonnière de ses ambiguïtés, de sa vie sociétale très particulière, de ses réactions et de ses impulsions vis à vis des hommes et des femmes qu'elle côtoie. Elle-même est enfermée dans un univers oppressant dans lequel la violence verbale se lie aux réactions de sa vie quotidienne. Ses créations de jeux vidéos ne sont jamais assez cruelles et sanguinolentes à son goût. Le sexe devient pour elle obsessionnel et l'on peut penser qu'elle a tout à fait intégré dans son existence ce violeur contre lequel elle tient à résister sans l'aide de personne. Michèle a le goût du risque, le sens de la répartie cassante bref, son entourage est un monde qu'elle manie à sa guise lui provoquant une profonde jouissance.
Ce film me laisse donc un peu sur ma faim car je me suis beaucoup plus intéressé à "Elle" qu'au supposé suspens que je me faisais un plaisir de découvrir. Le film cependant est donc loin d'être inintéressant et mérite d'être vu car il est servi par Isabelle Huppert dans le rôle titre qui à nouveau nous dévoile les contours d'une femme frisant la paranoïa mais paraissant bien dans sa peau, "isolée" à en devenir frustrée.
Autour d'"Elle", les très convaincants Laurent Lafitte, Patrick et son épouse Rébecca, Virginie Elfira semblent être les seules personnes "secourables" pour Michèle. Nous retrouvons également Anne Consigny dans le rôle d'Anna, la grande copine maltraitée par l'héroïne. Judith Magre interprète Irène, la mère très volage détestant Michèle qui le lui rend bien, toujours en quête d'un lifting et surtout d'un homme passager à sa convenance. Nous croisons également Charles Berling, Richard, l'ex de Michèle.


Paul Verhoeven réalise donc ce film en s'appuyant librement de "Oh...", une œuvre de Philippe Djian. Malgré son talent reconnu,le résultat est pour moi correct, uniquement grâce à l'étude très bien réalisée et minutieuse du personnage central. Pour le reste je reste sur mon sentiment de déception contrairement à certaines critiques de presse dithyrambiques. En tout cas Isabelle Huppert mérite bien que l'on s'attache néanmoins à ce film.


Note: 7/10

Grard-Rocher
7
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le 8 juin 2017

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