A une époque où souffrance et résilience font banalité dans le paysage, Elle ( le film et son personnage principal ) renouvelle la figure de l' héroïne romanesque loin des clichés féministes et post.


Les amateurs du cinéma selon Verhoeven connaissant sa capacité à subvertir les codes et son talent à sublimer le portrait d'une femme, il parvient sans se renier à les surprendre. Les néophytes eux se voient offrir une initiation magistrale aux ressources de l'art cinématographique.


Sans grands moyens, ni surenchère d'effets ou de coquetterie, le vieux monsieur est d'un souplesse felinesque pour embrasser le cinéma français et nous embarquer dans le sillage incroyable d'une femme à "l'irréfragable liberté"*.


Chez Djian, tout tient par le style, procurant cette précieuse liberté. Verhoeven transpose cette esthétique en son royaume, tirant parti de tout ce que son hôte le cinéma français peut lui offrir: acteurs, décors, mœurs locaux, parisianisme élégamment décadent, et liberté absolue de faire ce qu'il veut tant ledit cinéma est flatté de l' accueillir.


Le film est un objet improbable, presque irréel et surfait. L'Histoire mise en scène par un autre virerait au grotesque pompier ou à la provocation infantile ( Osons Ozon). Haneke autre hôte prestigieux de notre septième art aurait trop poussé côté perversité et dure froideur. Il y a ici un subtil équilibre qui tient de l' assemblage de cépages version grand cru, avec comme épicentre-corps du délit une Isabelle Huppert stupéfiante, et admirable, oui admirable... Aussi peu fan d'elle que je le suis, je me sens très à l'aise pour l'écrire ici: sans elle, il n’existerait pas ce film....


Mais le titre ne souligne pas assez une chorale de personnages remarquablement dessinés, bon tant pis je m' amuse....comme un tableau de Bosch qui dévoile peu à peu l' ampleur du désastre.
Sous le vernis des apparences et des conventions, personne n'est atteint du syndrome de la normalité, la déviance à tous ses degrés est déployée, sans vulgarité, ni complaisance.


Elle n'est que le symptôme ou le précipité d'un phénomène plus global, vis comme tu peux, vis comme tu veux, car tu n' as qu'une vie....


Verhoeven, notre maître hollandais des temps modernes...


*pour citer un éminent senscritiqueur.

Créée

le 18 juin 2016

Critique lue 371 fois

7 j'aime

2 commentaires

PhyleasFogg

Écrit par

Critique lue 371 fois

7
2

D'autres avis sur Elle

Elle
Velvetman
7

Désir meurtrier

Le contrôle et la manipulation sont des thèmes récurrents dans les films de Paul Verhoeven notamment quand ce dernier s’entoure de personnages féminins comme l’étaient Nomi (Showgirls) ou Catherine...

le 26 mai 2016

105 j'aime

14

Elle
mymp
5

Prendre femme

Évidemment qu’on salivait, pensez donc. Paul Verhoeven qui signe son grand retour après des années d’absence en filmant Isabelle Huppert dans une histoire de perversions adaptée de Philippe Djan,...

Par

le 27 mai 2016

86 j'aime

5

Elle
pphf
5

Dans le port de c'te dame

On pourra sans doute évoquer une manière de féminisme inversé et très personnel – à peine paradoxal chez Verhoeven : on se souvient de la princesse de la baraque à frites dans Spetters, qui essayait...

Par

le 3 juin 2016

73 j'aime

20

Du même critique

Les Enfants du paradis
PhyleasFogg
10

Sur le boulevard du crime, vous vous promenez, et tombez amoureux d'une fleur, Garance

Sur le boulevard du crime, vous vous promenez, et tombez amoureux d'une fleur, Garance. Il y a Baptiste, le mime enfant de la lune, tellement fou d' amour qu'il n'ose cueillir la fleur... Frédéric...

le 10 févr. 2013

70 j'aime

15

Chantons sous la pluie
PhyleasFogg
10

Make 'em laugh Make 'em laugh Don't you know everyone wants to laugh?

Qui peut résister à "Singing in the rain" ? Qui peut rester hermétique à ce film qui vous entraine, vous endiable, vous charme et à la fin vous terrasse de joie. Je me souviens encore de la stupeur...

le 25 juin 2013

64 j'aime

18

Timbuktu
PhyleasFogg
8

Mea culpa ou savoir accueillir un film pour ce qu'il est.

Longtemps je me suis gardé de rédiger une critique à ce film. Le parti pris du cinéaste, qui de la dérision, à la folle poésie, finissait en mélodrame, échappait en partie à mon entendement. Je l'...

le 21 févr. 2015

58 j'aime

15