Fight Club, ce n'est pas de la politique.

Fight Club, ce n'est pas un discours sur l'identité, sur l'autorité, le fascisme, l'anarchisme.

Fight Club, ça parle des choses.
Des choses qu'on pourrait changer mais qu'on laisse telles quelles parce que c'est facile.
Des choses que l'on a et qui nous possèdent et des choses que l'on désire posséder.

Fight Club, ça parle de l'hypocrisie d'une société hyper-sexuelle et hyper-consommatrice, mais qui a perdu toute humanité, toute chaleur. Qui réprime tout désir mais qui nous fait vouloir. Vouloir les filles qui se baladent à moitié à poil dans la rue mais qu'il faudrait ne pas mater. Vouloir les fringues à la mode mais déjà démodés. Vouloir la méga bagnole de ouf que tu pourras jamais te payer. Vouloir remplir ton apart' de conneries qui ne remplissent pas ta vie.

A cela, le film se rapproche de 2 oeuvres : 99F le film, et la chanson Brighter Discontent des Submarines.
Les choses pour remplacer le vide, pour remplacer le contact humain. Les choses pour oublier à quel point ces humains, justement, sont égoïstes, méprisables. Le consumérisme pour s'oublier consommateur, tel le buveur du petit Prince, buvant pour oublier qu'il boit. Vendre, encore et toujours, parce qu'il plus facile d'ouvrir et remplir son porte-feuilles que d'ouvrir et remplir son coeur et son esprit.

Mais là où Fincher avait tout compris, c'est en donnant à son film la forme la plus superficielle possible.
Ça brille, c'est pop, c'est plein d'effets à la con, le tout blindé de couleurs chaudes alors que, fonctionnellement, son film, son objet qu'il doit vendre en force pour rentabiliser, dit : "Je suis un produit de consommation de masse : ne m'achetez pas."

Qui mieux que Brad Pitt pour dire "Je ne suis qu'un putain d'objet marketing ! Je suis un beau gosse Calvin Klein adulé pour son physique et rien d'autre !"

Le DVD reprenait directement cela avec son panneau introductif : abruti, t'as acheté le DVD, t'as rien à foutre de mieux que de dépenser des thunes dans des trucs aussi superficiels qu'un DVD ?

Ceux qui possèdent l'ancien collector reconnaitront cette citation qui apparait dans le livret :

"J'ai cru à un moment que Fight Club délivrai un message avec un grand M. Quelque chose qui serait comme notre dernier mot, à nous autres dégénérés de la génération X. Et j'avais raison. Il y a un message dans Fight Club, et il dit : Putain grandissez !"

Même si je pense qu'il y a probablement une bonne pointe d'ironie dans ce message, et je ne saurai jamais si l'auteur de cette citation était sérieux ou non, c'est là, pour moi, le coeur de Fight Club : les hommes sont des gamins qui ne pensent qu'à faire joujou dans les jupons de leur maman.

Et d'autres hommes ont bien compris qu'ils pourraient en profiter pour leur faire gober tout et n'importe quoi, en leur faisant miroiter une vie remplie. Remplie de vide, donc.

Mais, rien de tout cela n'est pas grave. L'important n'est pas là.

L'important, c'est de vous précipiter chez votre revendeur le plus proche pour vous procurer le tout nouveau Blu Ray de Fight Club. Voilà, c'est ça. En fait, ne grandissez pas. Ne changez rien. Donnez-leur vos sous, plutôt.
Remy_Pignatiell
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le 20 oct. 2013

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