Je pense que, s'il devait y avoir une définition du film mineur, ce serait "Forever Young". L'intrigue se focalise pénardement sur du bon vieil "hibernatus" : on prend un Mel Gibson encore tout pimpant et on le fait s'ensevelir en 1939, pour se réveiller 53 ans plus tard, badaboum. Ca c'est pas de chance, d'autant que voilà dans ses pattes la mère célibataire mais pétillante, mademoiselle Jamie Lee Curtis et on pourrait presque s'attendre - enfin quoi, chiotte, on serait en droit de s'attendre - à une comédie romantique où le pauvre pauvre soldat ultra beau gosse redécouvre la vie au contact de la demoiselle au caractère bien trempé. C'est presque le cas - sans vouloir trop spoilé la fin. Mais en fait non. D'ailleurs, c'est bizarre comme c'est torché, ce film. Il y a certaines scènes qui jouissent d'un découpage juste stupéfiant, où le sens est presque laissé à la discrétion du spectateur. Genre, notre brave Mel passe une bonne partie du film à chercher son vieux pote, le professeur Finley. Alors qu'il croit avoir touché au but, il arrive chez un dénommé Finley. Ce n'est pas le bon. Plan suivant, il est dehors. Aucune précision, pas de séquence pour expliquer davantage ce qu'il s'est passé. Et... ha, oui, ben d'accord, c'était juste un homonyme.


Ce qui est réellement étrange, et a achevé de me rebuter, c'est l'impression insidieuse d'une fin tirée par les cheveux. Comment dire... le film se déroule mollement comme une assez fade romance entre Mel Gibson et Jamie Lee Curtis, sans que cela ne soit jamais totalement avoué, jusqu'à la scène du baiser entre les deux. Là on se dit "okay, bon, lui a enfin réappris à vivre, elle, elle est contente, elle est tombée sur un mec bien". D'autant qu'elle en cherchait un, puisque son prétendant, un docteur, était tout bonnement chiant comme la pluie. Bref, ça sent la fin qui va devenir dramatique et mettre en péril l'idylle naissante, avec l'Armée qui se remue un peu pour retrouver Gibson. Et là, patatra, ça devient n'importe quoi super vite.


Oublier la Jamie Lee Curtis, le bougre de Gibson apprend que son amour des années 30 est encore en vie et décide d'aller la voir, tandis que lui-même semble être affecté d'une maladie provoquant un vieillissement soudain. Mais genre, hyper soudain puisqu'il prend cinquante ans en deux heures max, le tout pour rejoindre son ancienne fiancée pas morte du tout et reprendre l'air de rien comme s'il ne s'était rien passé, avec un Elijah Wood qui intègre le truc très bien. Tout ça arrive comme un énorme cheveux dans un dé à coudre de soupe. Rien dans l'histoire ne préparait un dénouement aussi rapide et expédié (les scènes s'enchaînent super vite, il n'y a aucune montée de tension, pas même l'atterrissage en catastrophe). C'est vraiment et particulièrement bizarre, comme démarche : on a un film avec un peu de SF vite fait, beaucoup de comédie dramatique mêlée à de la romance comme c'était ultra courant dans les années 90 et bim, une fin complètement torchée avec des éléments qui apparaissent d'un coup d'un seul.


Et les personnages n'y changent rien. Jamie Lee Curtis est cool, c'est sûr, mais son rôle de maman paumée involontairement ultra sexy est assez étrange. A l'opposé, Mel Gibson n'est pas aussi sympa qu'il y paraît, intéressé mais pas trop par la donzelle, sympa mais pas trop avec son marmot, la chopant sans conclure, un véritable allumeur, le mec. Et du coup, dès qu'il semble s'investir dans le couple supposé qu'il devrait former avec Jamie, désolé, c'est trop tard, on arrive sur la fin, on va embrayer sur cette dernière intrigue super bizarre. Et ce rythme batard, ces personnages bizarrement taillés ne seraient rien sans une mise en scène si moyenne que le mot "moyen" a dû être inventé pour elle. Peu inspirée, elle n'est là qu'au service de l'intrigue, sans pour autant prendre une place importante, préférant largement laisser ses deux têtes d'affiche porter le long-métrage. Cool dites, ça fait pas démissionnaire du tout, comme intention de réalisation !


Ca ressemble plus à une sorte d'interlude dans les carrières de ses deux acteurs principaux, Curtis et Gibson, qui déploieront leurs talents dans beaucoup d'autres métrages (ou l'ont même déjà déployé par le passé). Du coup, on est plus sur ce genre de film ultra mineur, planqué dans les filmos comme une légère erreur de parcourt, à ranger sur l'étagère à côté d'un "Jumeaux". Ouais, c'est à ce point pas terrible, ouais.

0eil
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le 4 avr. 2015

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