Fritz the Cat
6.6
Fritz the Cat

Long-métrage d'animation de Ralph Bakshi (1972)

Bande-son du film, pour lire en musique.


Fritz the cat, je ne l'ai vu que pour deux raisons, bien distinctes : parce qu'il peut se classer dans le genre du stoner comedy - un genre que j'affectionne - et qu'il est même listé comme le premier de cette catégorie, et parce que la critique de Fritz the Cat par Fritz the Cat était suffisamment alléchante pour me donner envie d'aller fouiner du côté de cet ancêtre classé X, quelque peu tombé en désuétude, qu'est Fritz. Je vais tenter de pas faire dans la resucée, je m'attacherais ici surtout à mon expérience du film. Mais allez voir le texte de Fritz, toute la partie "anecdotes" est bien branlée et l'analyse est pertinente.


Fritz est un chat culotté qui drague la minette à grand renforts de guitares, de vague-à-l'âme mélodramatique et pseudo artistique et de quête de la vérité à coup de haschich. Lubrique, amoral, soixante-huitard sur le dard et clairement dérangé, le félin fêlé se fait trois frivoles coquines dans sa baignoire, toutes parties génitales à l'air et à l'écran, lorsque deux policiers cochons font irruption dans l'appartement pour mettre un terme à ces fumeries obscènes et ces rapports fumeux. Voila donc Fritz en cavale, arpentant le tout New-York puis l’Amérique dans sa quête - bien moins méta que physique - du sens de la vie.


Côté esthétique, pour commencer par ce qui se voit en premier dans un dessin animé, je dois te dire que je n'ai plus l'habitude de ce type de dessin, étant un bon vieux mangeur de Ghibli et autre japanimation. Passé le premier "choc", on se surprend à aimer la patte de Ralph Bakshi, un trait aisément identifiable, un peu curieux mais particulièrement adapté à l'intrigue de son film. Dans l'ensemble, y a pas à dire, le fait main ça apporte un vrai truc en plus. Tantôt plus noir que les corneilles, tantôt éclatant au détour d'un trip de notre chat sous herbe, le dessin confère à l'action un côté décalé en parfaite corrélation avec son ton. Rajoute à ça le design des cochons, rats, lions-juifs, chat blanc et black-corneille, et tu obtiens un sympathique morceau d'animation.


Au delà de son aspect visuel, Fritz the cat c'est une bonne dose de satire sociale, l’anthropomorphisme aidant. Les néo-nazis deviennent des serpents (et des lapins, on y reviendra), les noirs des corneilles, les blancs des chiens et des chats, les flics des cochons. Et le tout au sein d'une intrigue faisant la part belle aux croupes de tout poil, aux tétons dressés, aux verges turgescentes ou recroquevillées, aux poitrines animales abondantes. Bref, tu l'auras compris, y a de la fesse, et tout animal soit-elle, on comprend aisément que le film n'est pas pour tout public. C'est pas vraiment du Blanche Neige, du Disney gentillet, non môssieur !
Entre apologie de la fumette et de l'hédonisme, pas de princesses à sauver et de vertus à préserver, loin s'en faut.
Allègrement, Fritz se culbute un nombre conséquent de conquête, allant de la bourgeoise en quête de découvertes jusqu'à la mama black plantureuse et croqueuse d'hommes, le tout en tirant allègrement sur un bon spliff et en appelant à la révolution. En filigrane on retrouve un discours critique, critique de la société et des mœurs, critique de l'hypocrisie bourgeoise bien-pensante qui fait son mea culpa devant le black devenu "tendance", critique de cette jeunesse pseudo-rebelle et de son vocabulaire ridicule et creux, critique des répressions des émeutes des ghettos, critique de la violence à tous les niveaux. Ralph Bakshi passe la société de son temps au vitriol et ça fait un bien fou de le voir se déchaîner au travers du personnage déluré de Fritz qu'il s'approprie pleinement. Le constat est amer, malgré la morale amorale de Fritz, qui enjoint finalement le spectateur à profiter de la vie et de ses plaisirs, à faire l'amour sans violence.


Côté bande-son, de bons classiques jazzy qui font du bien aux oreilles - comme Yesterdays de Billie Holiday - côtoient des thèmes plus funky. La musique porte toutes les folles expériences de Fritz, rajoutant à l'ambiance sixties / début des années 70' de ce dessin animé, avec quelques passages rock'n rollesque bien burnés, où image et son sont parfaitement raccords, comme l'apparition de Blue.


Injustement méconnu, c'est ma sensation arrivé à la fin de cette critique. Je déplore moi-même mon ignorance passée, et veux poser ma petite pierre afin de faire connaître ce sympathique morceau d'animation. De par son étrangeté, tous les remous durant la gestation du projet puis la diffusion, de par son portrait déluré et critique de l'Amérique de ces années là, de par le plaisir qu'il procure...


Je m'étale pas, ce serait dégueulasse, mais mate le !

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le 25 juin 2015

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Petitbarbu

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