On m'avait vendu ça comme un film à la violence physique insoutenable. En fait, si la violence physique est bien présente tout au long du film, c'est surtout la violence psychologique qui rend ce film abominable. J'ai été pris d'un gros malaise en regardant ce film, alors même que j'étais seul.
Deux jeunes hommes, dont le caractère, l'attitude et l'aspect ne sont pas sans rappeler les personnages de Orange Mécanique, prennent en otage une famille à laquelle n'importe qui pourrait s'identifier (Des Monsieurs Tout-le-Monde) et leur font subir toutes sortes d'humiliations.
Le jeu des acteurs est vraiment stupéfiant (notamment les deux tortionnaires qui sont vraiment terrifiants), on est vissé à notre canapé devant tant de réalisme. Haneke utilise beaucoup la suggestion et le hors champs pour les scènes de violence, qui culminent
avec la mort de l'enfant, preuve la souffrance de l'innocence est encore plus insoutenable
Le pire, c'est que les deux complices dont le nom m'échappent ne sont pas réellement des psychopathes au sens où ils sont obligés de tuer : ils disent eux mêmes qu'ils sont fatigués de leur quotidien et veulent tenter des choses nouvelles. En réalité, Haneke veut que l'on s'identifie également à ces deux monstres. Tout comme eux, nous sommes en position de voyeur et le réalisateur ne manque pas de nous le rappeler : "Il vous faut une fin digne de ce nom" D'ailleurs, à plusieurs reprises le leader s'adresse à la caméra et contrôle même le film lors de la fameuse scène du Replay : preuve que nous assis dans notre canapé participons aussi à la souffrance de cette famille. Cela nous fait du bien de la voir souffrir car on se sent plus que jamais vivant. Même, on souffre avec eux, pour obéir à nos pulsions masochistes, tandis que le fait de s'identifier aux deux bourreaux obéirait plutôt à nos pulsions les plus refoulées, et on se sent coupable de regarder ce film, ce qui est l'objectif du réalisateur, en plus de dénoncer la banalisation de l'ultra-violence dans notre société.