sans titre, sans spoil

Je ne connais pas l'origine de l'histoire mais le mot gerry est habituellement utilisé par la bande de potes formée par Matt Damon, Casey Affleck et son frère Ben et signifie "foutre en l'air". L'analyse du film est comme toutes analyses, une interprétation personnelle. Si vous en avez une autre, je serais ravi de la lire :)

Après son remake de Psycho où il tentait de faire un film avec un travail prémâché (voir ma critique si le coeur vous en dit c'est assez complémentaire avec ce que je raconte là), Gus Van Sant tente ici de faire un film avec rien, si ce n'est comme souvent dans sa filmo, l'inspiration d'un fait divers plus ou moins marquant. Le fait que l'histoire soit en partie réelle n'est pas anodin puisqu'il cherche à "montrer la réalité", ce qui peut s'opposer à "faire un film". Et si vous avez compris ça, vous avez tout compris...

Le film est tout-à-fait réaliste. Imaginez deux mecs perdus dans un désert et vous obtenez la même chose. Les personnages de Gus Van Sant sont toujours des gros paumés mais cette-fois, ce n'est pas seulement moralement. Le film est une expérience sensorielle où le spectateur finit aussi fatigué, perdu et lassé que les personnages. Je peux donc comprendre qu'il déplaise. Le spectateur aime pleurer, avoir peur ou être dégoûté mais ne veut surtout pas s'ennuyer ! Certains regrettent le manque de péripéties mais les péripéties n'arrivent que dans les films. Or ici on est pas dans un film !

Le film se refuse à être un film. Gus Van Sant a calculé ses plans pour qu'ils paraissent non-calculés. Une mise en scène participerait à la sensation d'avoir à faire à un film. Il voulait donc que la caméra paraisse indépendante presque comme un troisième personnage qui serait donc le spectateur (cela rend l'épreuve encore plus immersive). La caméra va et vient, se rapproche et s'éloigne des personnages de manière totalement aléatoire, au gré de ses envies, comme si elle n'était pas qu'une simple machine sans âme.

J'évoquais au début la signification du titre qui est aussi le prénom des deux personnages principaux joués par Damon et Affleck. Eux-mêmes gerryent le film en refusant le scénario prévu (faire leur randonnée) et en décidant de faire demi-tour. C'est alors qu'ils se perdent. Ils sont hors du film.

Le thème de la mort est présent comme dans absolument tous les films de Van Sant mais il y a aussi une certaine réflexion sur le vide. L'absence de scénario concret, les paysages désertiques... C'est une étude de ce qui transforme la réalité en film, le réalisateur cherchant à s'éloigner de tous artifices cinématographiques. Je dois bien avouer qu'à l'image de Psycho ou d'autres, que le concept est plus intéressant que le visionnage et que le projet est assez égoïste, apportant plus au réal lui-même dans sa quête de compréhension du cinéma qu'aux spectateurs. Mais libre à nous de nous poser les mêmes questions et de toute façon je ne pense pas que plaire à un grand public soit le but recherché par Gus Vant Sant.