Dario Argento est sans conteste le réalisateur pour lequel j'ai le plus d'indulgence. Même dans ses films les plus décriés, Le Fantôme de l'Opéra, The Card player ou Mother of tears pour citer ceux que la critique a le moins ménagée, on trouvait des fulgurances qui laissaient à penser que le « Maestro » n'avait pas flingué tout son talent. Alors, même si Giallo était édité directement en DVD chez nous deux ans après sa sortie en Italie, j'avais envie de garder espoir. Même s'il débarquait dans les bacs précédé d'une rumeur catastrophique, je voulais croire en la bonne surprise.

Hélas, le plantage est bien total. La jaquette nous vend « le retour au sources du Maître de l'épouvante ». Alors soit on crie à la publicité mensongère, soit on pleure d'assister ainsi au déclin d'un réalisateur qui a renoncé à tout ce qui a fait la force de son œuvre. Je préfère rester optimiste et pencher pour la première explication. Car Dario Argento n'est pas à l'origine du scénario. Derrière cette abomination se cachent deux américains, Jim Agnew et Sean Keller. Sous prétexte de rendre hommage aux gialli, ils ont commis ce « Yellow » que personne n'a voulu produire à Hollywood. Leur script a alors traversé l'Atlantique pour atterrir chez Hannibal Pictures qui l'a soumis à Dario Argento. Dans un moment d'égarement, sans doute, celui-ci a accepté de le porter à l'écran après avoir proposé quelques aménagements dans l'intrigue, ce qui explique qu'Argento est crédité en tant que co-scénariste.

Penchons nous sur ce fameux -fumeux conviendrait mieux- hommage. Le b.a.-ba quand ont veut caresser le giallo dans le sens du poil, c'est de reprendre ses codes. A commencer par le tueur aux mains gantées de cuir. Mais ce « détail » semble avoir échappé à Agnew et Keller. Le trauma enfantin répond présent mais les fausses pistes ont déserté. Le visage de l'assassin nous est dévoilé à la moitié du métrage et c'est d'ailleurs quand sa « particularité » est révélée que l'on abandonne tout espoir. On retrouve bien les jeunes filles occises à l'arme blanche mais, à l'écran, les meurtres restent hors-champ. Oubliées les demoiselles traquées par un psychopathe, cherchant à trouver une issue de secours dans un décor qui devient un personnage à part entière. Là, les victimes sont ligotées dès le début. On est donc loin des scènes chocs qu'offraient L'Oiseau au plumage de cristal ou Les Frissons de l'angoisse. En revanche, on a l'impression que la pellicule a été contaminée par un de ces débectant torture-porn ainsi que par toute une esthétique télévisuelle policière à l'américaine.

Le scénario exploite d'ailleurs moins l'enquête sur l'identité du tueur qu'une course contre la montre pour retrouver une jeune fille kidnappée et dont la vie est en danger. Elsa Pataki, recrutée pour ce rôle, ne parvient même pas à apparaître comme une scream queen débutante crédible. Sa sœur, Céline, est jouée par Emmanuelle Seigner qui tente de nous faire gober qu'elle se fait du mouron pour sa cadette. Elle colle aux basques d'un flic américain auquel Adrien Brody essaie de donner un semblant de crédibilité mais ne prend pas le soin d'éviter d'en faire des tonnes.
Bref, tout dans ce film part en roue libre et le spectateur lui, trouve vraiment le temps long. Il paraît que, lors de la postproduction, Dario Argento a abandonné le banc de montage. C'est dire si le résultat s'annonçait glorieux. Un conseil : mieux vaut tenir éloignée cette galette de votre lecteur DVD pour vous épargner un spectacle affligeant. Ce qui est terrible, c'est que le nouveau projet sur lequel planche Argento, un Dracula en 3D, me fait maintenant vraiment flipper. Mais pas pour les bonnes raisons.
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le 30 juin 2011

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