Je ne connais guère plus grand plaisir que celui de saisir un livre inconnu, vierge de toute attente, de s’y plonger et de découvrir un écrivain. C’est dans cet état d’esprit que j’insérais le DVD dans mon lecteur. La première scène s’ouvrit sur les efforts maladroits de deux seniors rondouillards pour escroquer une femme sénile, qui se révéla être la mère de l’un d’eux. Mon épouse se leva et quitta la pièce. Dépité à l’idée de me coucher seul, j’accordais une dernière chance à Gianni. Bien m’en a pris


Gianni Di Gregorio écrit, dirige et joue le rôle titre d’un film original et doux amer. Il incarne un sexagénaire romain contraint par une précoce préretraite à l’oisiveté. Gianni aime les femmes et le prouve en leur rendant moult services gracieux. Sa compagne encore active, la splendide et bruyante voisine, sa fille étudiante, l’infirmière de sa mère… La sublime méchanceté de cette dernière sauve le film de la mièvrerie. Ce monstre d’égoïsme et de jouissance tardive brûle le reliquat d’une fortune nobiliaire en parties de poker, champagnes millésimés et traiteurs fins. Sous les plus futiles prétextes et à toutes heures, elle persécute le trop complaisant Gianni. Pour son troisième film, Valeria De Franciscis sera nommé au David di Donatello de la meilleure actrice pour un second rôle. La « jeune » actrice décèdera deux ans plus tard à 98 ans.


L’ami roublard (Alfonso Santagata) tente de réveiller en Gianni l’envie de courir les filles, comme jadis. Malgré tous ses efforts, Gianni restera fidèle à une épouse qu’il aime probablement encore. Est-il trop gentil pour « conclure » ? A moins que dans un monde où nos contemporains refusent de vieillir, Gianni soit le dernier sage. Le charmeur suranné cède sa place aux plus jeunes. Il ne « court plus », mais badine. Qu’est-ce que vieillir ? Si ce n’est accepter de diminuer : le séducteur se fait séduisant, l’amant ami… Le jeune homme rêvait de conquérir de belles inconnues, le vétéran sourit à l’idée de les incorporer dans ses rêveries. Les derniers rêves sont les plus beaux.

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le 23 août 2016

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Step de Boisse

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