Ginger & Rosa par Ghislaine Borie
Juin 1945, la première bombe atomique s’écrase sur Hiroshima. Au même moment, à Londres, deux femmes sont sur le point d’accoucher de deux petites filles qui deviendront inséparables : Ginger et Rosa.
Dix-sept ans plus tard, les deux jeunes filles sont comme toutes les adolescentes, rebelles et romantiques. Contexte favorable : Rosa est élevée par sa mère que son mari a quitté, et Ginger a pour père un intellectuel pacifiste particulièrement compréhensif et surtout particulièrement volage. Ginger, intelligente et dynamique, se passionne pour les actualités du moment, à savoir la guerre froide et l’installation de missiles à Cuba. Réunions, manifestations, elle milite pour la paix et le désarmement. Rosa, quant à elle, fait semblant de s’intéresser à tout ça car en fait, elle cherche le grand amour, celui qui dure toute la vie. C’est lorsque la cellule familiale de Ginger explose à son tour que tout bascule.
Ginger, si forte et si engagée, va se laisser submerger par ses émotions. La peur des bombes et de la guerre ne sera finalement plus rien face à la souffrance et la trahison de ceux qu’elle aime le plus. Cruel constat que de se rendre compte que notre échelle de valeurs peut s’inverser du jour au lendemain et que le militantisme le plus sincère peut se faire balayer par la colère et la tristesse de voir des proches faire des choix personnels discutables. Évidemment, il faut garder à l’esprit que Ginger n’a que 17 ans et que tout ça viendra nourrir sa personnalité bien trempée. Du moins, on l’espère.
Cette chronique douce amère sur les enfants du baby-boom est portée par deux jeunes actrices qui irradient. Alice Englert et surtout Elle Fanning sont stupéfiantes de naturel et de spontanéité. Elle Fanning (digne sœur de son aînée Dakota) est quasiment née devant une caméra. Son jeu et son naturel m’ont toujours sidérée. Ses rôles d’enfant et maintenant d’ado sont bientôt terminés, j’espère qu’elle saura trouver sa voie dans une carrière à la hauteur de son talent. Beauté imparfaite mais magnétique, j’espère que les réalisateurs sauront tirer parti de sa fraîcheur et de son intelligence.
La force de ce film, outre la prestation d’Elle Fanning, c’est sa réalisation par Sally Potter, dont je n’avais vu aucun film jusqu’à présent. J’ai beaucoup aimé les plans rapprochés sur les visages, sur leur vérité, leurs émotions brutes. Beaucoup aimé aussi la discrétion voire l’absence de la musique dans les scènes dramatiques. Par contre, quelques morceaux d’anthologie pour des scènes où la musique était partie prenante (juke-box, vinyles), histoire de nous replonger dans ces années 1960, période charnière entre traumatisme de la guerre et grandes espérances.
Un petit mot sur l’affiche. Sur le fond, Rosa et Ginger ne regardent pas dans la même direction. Un peu cliché. Sur la forme, je me dis que Photoshop devrait être interdit à certaines personnes. Je reconnais à peine les gamines, avec ces couleurs bizarres limite cartoon.