Avant Good Time, les frères Safdie étaient spécialisés dans le drame naturaliste. Au grill, on a encore du mal à comprendre ce qui a bien pu motiver leur changement radical de style mais on ne va pas se mentir pour un coup d’essai dans le monde du polar, ils frôlent le coup de maître.


Pourquoi frôlent ? Tout simplement parce que Good time dépeint une descente aux enfers dans les rues d’un New York poisseux comme le cinéma américain en a fait des années 60 au crépuscule des années 2000. Les Safdie en sont conscients et malheureusement, ils ont du mal à se détacher de leurs références. « Main Streets », « Little Odessa », « Un après-midi de chien » ou encore « La vingt-cinquième heure », telles sont les œuvres que les deux frères additionnent à leurs passions récentes pour les plans éclairés aux néons et leurs sympathies inconditionnelles pour les marginaux.


Ici, Robert Pattinson y incarne brillamment un beau spécimen : Connie, petite frappe aussi charismatique qu’antipathique, toujours adepte du mauvais choix et dont les bonnes intentions vont le rendre toxique pour la plupart de ses proches. Avec un tel antihéros, il fallait s’attendre à une descente aux enfers de qualité. En l’occurrence, après une tentative de braquage ratée avec son frère handicapé qui a conduit ce dernier en prison, Connie sera prêt à tout, le temps d’une nuit, pour le faire sortir.


Pourtant, malgré le manque d’originalité de son intrigue simpliste, Good time impressionne par sa virée hypnotique dans les bas fonds new-yorkais. Tous les personnages sont croqués avec finesse par les Safdie et interprétés avec brio par des interprètes investis. Outre Pattinson, qui était l’autre grand favori pour le prix d’interprétation masculine à Cannes après Joachim Phoenix, les seconds couteaux sont tous excellents, de Ben Safdie dans le rôle du frère handicapé à Jennifer Jason Leigh incarnant une couguar incapable.


Reste à évoquer la cerise sur le gâteau, cette mise en scène aussi esthétique que tendue qui nous fait ressentir toute l’urgence de la situation et le cauchemar que va vivre le protagoniste. Malgré des petites erreurs techniques grossières (l’équipe technique que l’on voit dans le reflet d’une vitre), elle donne une singularité qui tranche avec une bonne partie des polars américains qui sont sortis ces dernières années. Bref, un film noir de qualité comme en voit trop rarement pour pouvoir passer à côté.

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le 20 oct. 2017

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