De la guimauve pour hipsters technophiles
Chaque période de l'histoire génère ses grandes histoires d'amour impossibles. Et on peut supposer que Her est l'une de celles qui parlent à la génération Internet, une génération qui fait l'amour sans contact physique par simple écran interposé.
Si l'on aime les histoires d'amour, Her est peut-être très bien. Un homme, dont le métier est d'écrire des lettres d'amour pour d'autres se retrouve dans une relation amoureuse épistolaire grâce à la magie de la technologie. Très beau pitch. Très romantique.
Beaucoup ont crié au génie de la science-fiction car la femme dont l'homme est amoureux est un programme informatique. Là, du coup, ça m'intéresse plus.
Sauf que non. Le concept n'est pas exploité au tiers du quart de ce qu'il pourrait. Le programme informatique a immédiatement une personnalité, tombe immédiatement amoureux et puis c'est parti pour deux heures d'une histoire d'amour avec des hauts et des bas, le tout saupoudré d'un zeste de tolérance sociale dans une parodie mièvre et maladroite des amours interraciaux des siècles précédents.
Les questions existentielles sur l'intelligence artificielle sont traitées comme un manuel de catéchisme de l'époque victorienne traitait de la sexualité : pudiquement évoquées, pour la forme, et presque par hasard, le sujet ne pouvant tout simplement pas être évité. Même le concept de singularité, pourtant central, n'est pas évoqué alors même qu'on y assiste dans l'histoire !
Pour le reste, les dialogues interminables sont du niveau d'un épisode de Beverly Hills 90210 :
— Je ne sais pas comment te dire…
— Dis moi !
— Non, je n'ose pas…
— Allez, dis moi. De toutes façons tu n'as pas de corps.
— Quoi je n'ai pas de corps ? Je ne suis pas assez bien pour toi peut-être ?
— Ce n'est pas ce que je voulais dire…
C'est dommage car le film avait un excellent potentiel. Sa mise en place posait d'extraordinaires questions mais, au lieu de chercher les réponses, le réalisateur se complait ici dans l'observation passive de petits détails mièvres, tentant de jouer la profondeur avec des « oulala, dans le métro, tout le monde il est sur son smartphone ».
Bref, à éviter si vous cherchez un film qui traite de SF ou d'intelligence artificielle. À voir potentiellement si vous aimez la guimauve.