George Meliès, s'il n'est pas le créateur du cinéma, est sans doute la personne au monde qui a été la plus influente en la matière et depuis sa création. Parisien, né en 1861 et d'abord prestidigateur, il est invité à découvrir lors de la première projection publique en 1895 la fameuse "Sortie des Usines Lumières" des frères du même nom et comprend à ce moment-là que le cinéma sera sa vie.
Il serait bien trop long de résumer tout ce que Meliès a fait pour le 7e Art. On retiendra donc quelques chiffres et dates comme la création en 1897 du premier studio de cinéma à Montreuil, comme les 300 (ou 500 selon les sources) films qu'il a tournés dont Le Voyage dans la Lune en 1902. On lui doit aussi la pellicule à bords percés et l'invention de la croix de malte destinés aux premiers projecteurs.
A la fin de sa vie, poursuivi par un créancier, il finit vendeur de jouets à la gare Montparnasse.

La gare Montparnasse, point de départ d'Hugo Cabret.

Brian Selznick, auteur du roman d'origine, a en effet choisi de parler de Meliès à la fin de sa vie et d'imaginer une fable autour de cette gare. Hugo Cabret est donc le héros, un petit garçon sans famille, qui vit dans les coulisses de la gare avec un oncle chargé de remonter les horloges. Il vole chez un vendeur de jouets mécaniques différentes petites pièces destinées à réparer un automate qu'il tient de son père, et à qui il manque une clef en forme de coeur. Il va rapidement découvrir que le robot et le vendeur de jouets, "Papa George", sont intimement liés.

Vous l'avez compris, ce n'est pas un secret ni un spoiler, mais il est bien question ici d'un Meliès tombé dans l'oubli et d'un jeune homme en quête de réponses qui va vouloir remettre l'artiste dans la lumière. A travers cela, c'est tout un hommage au début du cinéma qui se dessine. Et qui de mieux qu'un des grands plus réalisateurs actuels pour adapter cette belle histoire à l'écran ?

C'est très fidèlement, selon les mots de Selznick lui-même, que Martin Scorsese adapte Hugo Cabret dans ce qui se révèle être sans aucun doute le film le plus magique de 2011.
Il est évident que si beaucoup de livres sont adaptés alors qu'ils ne devraient pas l'être, celui avait toute sa place au cinéma. Scorsese l'a si bien compris qu'il lui fallait faire quelque chose de spécial pour le mettre en image : la 3D. Après tout, quel plus bel hommage à l'inventeur des effets spéciaux que de celui de réaliser le plus beau film jamais fait en 3D. Grâce à des caméras savamment posées, à des plans de foule au coeur desquels est plongé le spectateur et quelques artifices (comme la neige qui vole, ou les poussières dans la gare), Marty nous plonge au coeur de l'histoire.

Il le fait avec une minutie sans doute inégalée pour un anglo-saxon tournant en France, veillant bien à ce que l'intégralité des décors soient français, fassent français et ne virent pas au cliché facile. Aidé par une sublime photo et la musique d'un Howard Shore au meilleur de sa forme, le spectateur se laisse prendre par ce conte tout en découvrant l'origine du cinéma qu'il ne connait peut-être pas. En effet, non content de caser "L'Arrivée en Gare de la Ciotat" dans le récit, Scorsese va jusqu'à reconstituer le studio de tournage de Montreuil à taille réelle et nous y montre un Meliès (interprété par Sir Ben Kingsley, absolument impeccable) en plein travail, comme si nous le suivions dans un documentaire.

Hugo Cabret est donc plus qu'un simple film. C'est à la fois une belle histoire, riche en émotions, dont la base est accessible au jeune public tout en étant un magnifique hommage d'un génie à un autre mais aussi d'une époque et une technologie à une autre : des images peintes une à une à la main et à la 3D.
Et au-delà de l'hommage et de l'histoire, c'est un moyen pour le cinéphile de 2011 de découvrir ce qu'on pouvait voir plus de cent ans auparavant.

Et en finissant son chef d'oeuvre dans une salle de cinéma pour montrer du Georges Meliès en 3D, Martin Scorsese boucle une boucle que seul lui pouvait se permettre.
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le 7 déc. 2011

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