Suspense redoutable au service d'une allégorie... un peu perchée

Une chose est sûre, It Comes at Night ne laisse personne indifférent. En témoigne mon ressenti et celui des spectateurs placés derrière moi, peu avares en adjectifs péjoratifs à l'encontre du film. Dans le courant des nouvelles productions horrifiques minimalistes jouant sur l'attente plus que sur les effets tape-à-l’œil, il a réussi à se faire sa place en dépit d'une distribution limitée, bien aidé par les bons retours nord-américains. Et effectivement, It Comes at Night ne se regarde comme le dernier des films d'horreur un peu cheap tablant essentiellement sur des jump scares. Ce qui ressort de It Comes at Night, formellement parlant, c'est la splendeur de la photographie, en adéquation avec le travail exceptionnel effectué sur la lumière, et la bande son angoissante au possible. En plaçant un jump scare en début de film, le ton est donné.


Ou pas. Les gros coups de flip arrivent en début de film ce qui contribue à nous tendre pour le reste du film. On attend toujours quelque chose qui n'arrivera peut être pas.


En terme de narration, c'est très habile, d'autant plus que le film ne dure "que" 1h30. Autre élément qui va amplifier l'implication du spectateur : l'ambiance. Disons qu'il m'a paru assez vite que ce qu'on nous montre n'est peut être pas à prendre au sens littéral. Le montage va dans ce sens, notamment lors des séquences nocturnes se passant en général dans les rêves de l'ado de la famille. Ayant ceci en tête, j'ai cherché des pistes d'interprétation dans chaque plan. J'ai, de fait, passé 1h30 vissé à mon siège, pris dans la narration et actif dans mon visionnage. Ce qui me permet de dire, au passage, que je recommande de ne pas être passif. Ça serait passer à côté d'un pan important du film. Après, pour ce qui de l'interprétation...


Je vais coucher sur ces quelques lignes l'interprétation que j'ai du film. J'ai bien conscience des différents degrés de lecture que l'on peut en avoir, c'est pourquoi je vous encourage à partager dans les commentaires votre avis, vos pistes, bref ce que vous en pensez. Ma conclusion est à la fin de la zone "spoiler" suivante.


De mon point de vue, It Comes at Night est une allégorie sur le passage à la vie adulte. Le personnage principal, celui par lequel on assiste à l'action, est l'ado de la famille. On peut voir en début de film plusieurs éléments le rattachant à l'enfance (le chien, ses jouets). Cependant il doit faire face à différentes étapes qui le mettent sur la voie du changement : tout d'abord, il perd son grand-père. Il est ensuite sujet à son éveil sexuel, commence à défier l'autorité de ses parents (il s'enfuit dans la forêt pour chercher son chien), rencontre d'autres personnes au contact desquels il va apprendre différentes choses (Will qui lui enseigne à couper du bois) pour au final faire tomber ses parents de leur piédestal lors de la séquence finale. Je perçois sa mort d'une manière plus métaphorique, d'autant plus que le plan final montre son père et sa mère seuls à table. A cela, on peut rajouter ses rêves en rapport avec la mort, le franchissement de la porte qui parait comme un interdit, accentué par le fait que cette dernière est le seul élément du film doté d'une couleur vive, etc... Les symboles ne manquent pas.


Ceci étant dit, je recommande It Comes at Night, néanmoins n'y allez pas pour avoir peur, il ne peut que vous décevoir sur ce point. Le film va beaucoup plus loin et c'est ce qu'on en retiendra. Peut être aussi l'interprétation de Joel Edgerton.

remimazenod
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Créée

le 11 août 2017

Critique lue 266 fois

Rémi Mazenod

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