Je suis une légende par julienl
Préambule. Je n'ai pas lu le roman de Richard Matheson. Je n'ai pas vu les deux précédentes adaptations cinématographiques. C'est important, car une fois cela fait, mon avis changera peut-être substantiellement sur ce film.
En attendant...
Les films de morts-vivants, j'adore, mais j'en ai déjà vu beaucoup. Les films de fin du monde, j'adore mais j'en ai déjà vu beaucoup.
Will Smith, je n'adore pas, mais alors pas du tout. Et je trouve qu'on l'a déjà vu beaucoup. Trop. "Men in Black", "Independance Day", toussa toussa. Trop.
Malgré une histoire intéressante et le conseil d'un ami, je partais perdant, battu avant même d'avoir appuyé sur play. Ou simplement animé par l'envie de faire une critique un peu méchante. Ça fait longtemps. Gniark.
Bien mal m'en a pris. J'ai beaucoup aimé ce film.
Pour la petite histoire, Robert Neville est militaire (lieutenant-colonel) et scientifique. Depuis trois ans il vit seul avec sa chienne dans un New York dévasté. Tout le monde est mort. Mort à cause d'un remède qui devait redonner la vie: un vaccin contre le cancer. Seulement l'expérience a mal tourné et le remède s'est transformé en épidémie. 90% de la population est morte, 9% s'est transformée en monstres humanoïdes (ou zombiformes, c'est selon) obligés de se terrer dans le noir, car incapables de supporter les rayons UV. Seul, au milieu de ce chaos, Robert Neville poursuit ses recherches pour trouver un nouveau remède contre ce mal destructeur.
Premier constat, la photo est belle. Les décors, superbes. Un New York où la nature reprend ses droits, encombré de carcasses de ferraille, peuplé de meutes de cerfs, parcourue ici ou là par quelque fauve échappé du zoo.
Et, tout seul, Robert Neville (Will Smith). L'homme s'est bâti un refuge fortifié. Militaire, il possède un stock d'armes. Il arrive a produire de l'électricité à l'aide d'un générateur dont on ne sait pas trop comment il tourne (l'une des rares faiblesses du scénario).
Seul, pas tout à fait, puisque sa chienne, Samantha, l'accompagne partout.
Mais un chien, aussi intelligent qu'il puisse être, ne remplace pas un humain. La solitude a plongé l'homme dans un semi-délire permanent. Il la traite comme un enfant, lui fait manger des légumes, lui donne son bain, mène avec elle des dialogues imaginaires. Il a récupéré des mannequins. Ceux-ci peuplent un imaginaire qui agit comme une soupape de sécurité: il les a placé dans une bibliothèque où il se plaît à jouer des scènes qui auraient pu être celles de la vie de tous les jours. Puis replonge dans un état semi-sauvage de chasseur de cerfs.
(Éléments de l'intrigue révélés)
Le réalisateur mène si bien son film que le spectateur se prend lui aussi voir en ces mannequins de vrais humains: apercevant une silhouette humaine, visiblement connue, mais refusant d'obtempérer, Robert Neville lui tire dessus de sang froid. On pense tout de suite au meurtre. Lui aussi d'ailleurs, car il craque, avant de prendre conscience que ce mannequin n'était qu'un leurre placé par lui-même.
La solitude, encore et toujours. A la mort de son chien, il veut mourir. Il s'en sort, sauvé par deux survivants qu'il appréhendera tel un sauvage, instant tant désiré mais au combien difficile à supporter: repasser de l'état de bête solitaire à celui d'animal social.
Les monstres ne sont pas trop mal faits, comparés à bon nombre de films où, loupés, ils suffisent à plomber l'ensemble. Animaux de nuit, mi-hommes, mi-zombies, ils savent faire monter efficacement l'angoisse.
L'intrigue se déroule sans accrocs, entrecoupés des souvenirs de Neville, ceux du moment où tout à basculé, permettant par la même de comprendre l'ellipse initiale.
Quant aux deux fins, je ne sais laquelle choisir. La fin officielle, ou Robert Neville trouve l'antidote mais se sacrifie pour sauver ses compagnons, qui pourront après retrouver le camp de réfugiés ? Ou celle où il arrive à gagner le respect des monstres en leur rendant le cobaye qu'il avait réussi à capturer ? Au moins la seconde laisse une fin plus ouverte, laissant le spectateur se faire sa propre idée sur l'hypothétique camp de réfugiés que les survivants tentent de gagner.