Jin Roh est une diachronie qui se situe dans les années 60, au Japon, période qui connaît de très nombreux mouvements sociaux qui opposent les étudiants de mouvance marxiste avec les forces de l'ordre, donc le gouvernement.
Jin Roh prend pour hypothèse de voir le Japon sombrer ou du moins se laisser tenter par le totalitarisme, tentation toujours présente de nos jours, d'ailleurs. Pour cela, le film déploie une imagerie sans équivoque : masques à gaz, yeux rouges, casques allemands et même nom d'unité - Panzer Unit. Tout rapelle le nazisme.
En utilisant le conte populaire du Petit chaperon rouge, Jin Roh tisse un lien métaphorique entre un loup, Fusé, et le petit chaperon rouge, une jeune fille révolutionnaire, sosie troublant de la seule et unique femme que le soldat d'élite a hésité à tuer dans son existence. Le procédé est osé, mais le conte populaire se superpose avec grâce dans le contexte d'espionage du film et dans son sous-texte politique.
Le conte a le mérite de fixer le sort des personnages dès le début. Mais en créant une histoire d'amour, le film parvient habilement - alors que c'est un élément imposé par les producteurs - à créer une relation ambigüe, complexe, pudique, avec un final d'une rare intensité dramatique.
Si le film est un film produit rapidement (une année) et se trouve être l'un des derniers films réalisés de façon classique (feuilles de celluloïd sur décors, le tout filmé), on s'étonnera néanmoins des trouvailles de réalisation. La scène d'introduction est à cet égard une merveille de cinéma.