Le voyage du brave

J'ai dû voir ce film au moins en partie quand j'étais gosse. Je n'en ai retenu que la fin, quand les personnages s'avouent leur amour au-dessus du volcan. Sauf que, bizarrement, j'en avais extirpé toute la substance comique, ne préservant alors plus que la romance à cette scène... comme au reste du film.

Je fus donc surpris de cet univers très riche, parfois un peu Kafkaïen mais surtout complètement absurde et loufoque en revoyant ce film. Malheureusement, j'ai trouvé l'histoire un peu molle : il faut dire que le héros ne prend rien au sérieux, ce qui déforce les conflits (pour ne pas dire les rendre complètement insignifiants). L'un (le héros qui ne prend rien au sérieux) n'implique pas forcément l'autre (conflits insignifiants), mais l'auteur ne réussit jamais vraiment à faire monter la tension pendant que son personnage se montre insouciant par rapport à tout ce qui lui arrive. Mais bon, c'est drôle et puis on se retrouve dans des situations assez cocasses. Le côté aventure initiatique est assez bien mené aussi : ce genre de voyage a ceci d'épineux qu'il est souvent linéaire et que le héros risque de rencontrer une série de personnages différents, sans liens apparents : l'auteur se débrouille ici pour faire durer chaque partie, du coup, on ressent moins le côté 'accumulation de scènes'. De plus, le réalisateur a la bonne idée d'utiliser Meg Ryan dans trois rôles différents, ce qui permet de tisser un lien d'une scène à l'autre, même si ses personnages n'ont que très peu avoir (personnalités différentes et même si les deux dernières sont demi-sœurs, le lien familial n'est jamais vraiment exploité).

La mise en scène est très plaisante. Les décors, qui ne sont pas sans rappeler ceux des films expressionnistes (le début fait d'ailleurs évidemment penser à "Metropolis"), sont très bien travaillés, riches en détails. Les effets spéciaux sont très kitschs (j'ai pensé à Gilliam pour certains effets visuels, comme la lune qui se lève ou les hallucinations). Le découpage-montage fonctionne assez bien ; il y a quelques longueurs, des séquences qui auraient gagné à être raccourcies, mais dans l'ensemble cela se laisse regarder très aisément. La BO est très chouette que ce soit en reprenant directement les morceaux ou en se les réappropriant (j'ai tapé du pied plusieurs fois, ce qui est une repère scientifique considérable dans le domaine musical). Les acteurs sont très bons aussi : je ne me souvenais pas du tout de la tronche de Hanks au début du film, ça m'a bien fait marrer de le voir avec son mulet (et je me suis sérieusement demandé s'il allait le garder comme ça pendant tout le film) ; le bougre est jeune mais déjà vif et maître de son langage corporel. Meg Ryan, toute fraîche, pas encore bistourée, est pétillante, agréable et endosse très facilement les trois rôles. Ha, j'apprends, grâce à IMDb, que la belle va à nouveau être réunie avec Tom Hanks (pour la quatrième fois donc) sous la réalisation de... Meg Ryan (son premier long métrage en tant que réalisatrice ; elle aurait lu le roman alors qu'elle était en pleine séparation avec Dennis Quaid).

Bref, "Joe Versus the Volcano" est une comédie agréable même si ça aurait pu être un poil plus dynamique.

PS : mince ! je viens de m'apercevoir que le réalisateur n'a fait que deux films, et que le second est "Doubt" un excellent film qui n'a absolument rien à voir avec celui-ci ! Je vois qu'il a aussi écrit le screenplay de "Alive" qu'il faudra que je voie ne fut-ce que pour Ethan Hawke.