La trilogie consacrée à John Wick possède bien des défauts, mais elle risque sans doute de rester LA trilogie de films d’action des années 2010 (comme Jason Bourne avait été LA trilogie de films d’action des années 2000).
Certes, c’est de l’action bourrine. Oui, l’histoire n’est qu’un vague prétexte qui donne le point de départ à un déluge de bourre-pifs, fusillades, courses-poursuites et tout ce qui va avec.
Mais John Wick se démarque clairement de ses petits camarades par deux éléments majeurs.
D’abord son esthétique. Se déroulant presque entièrement dans les rues de New-York, John Wick brille par ses plans nocturnes éclairés aux néons, qui donnent une impression techno très stylisée.
Mais surtout les scènes d’action sont très esthétisées. Longs plans, amples mouvements de caméra, chorégraphies des combats très travaillées, les trois films fourmillent de scènes qui restent en mémoire. Rien que dans ce troisième épisode, il faut citer une course-poursuite en moto de toute beauté, ainsi qu’un combat dans une salle de glaces et de miroirs (combat qui oppose, entre autres, Mark Dacascos et surtout l’excellent Yayan Ruhian, un des acteurs de Raid).
Dans ces combats, tout peut servir d’arme : mains, véhicules, animaux, murs et mobiliers, livres, et même des armes !
C’est sombre et violent, mais bien filmé et souvent bluffant.
L’autre élément qui fait de John Wick une trilogie majeure, c’est le monde dans lequel se déroulent les films. Au fil des films (et surtout dans ce troisième épisode), l’univers des tueurs et des mafieux prend de la consistance. C’est un véritable état, avec ses lois, son administration, et son gouvernement.
Ainsi, on a ce lieu fascinant, l’hôtel Continental. Sorte de lieu de refuge pour tueurs et mafieux en villégiature ou au chômage technique, il est une sorte de zone neutre dans laquelle celui qui se réfugie est protégé par les règles qui régissent le monde du crime organisé. A la réception il y a le très classieux Lance Reddick (Fringe, Bosch) et à la direction, l’excellent Ian McShane (Deadwood).
Cet hôtel s’inscrit dans un New-York qui a décidément une place de premier ordre dans les films. Un New-York secret lui aussi, comme un double inversé du monde diurne. Les magasins cachent des arrière-boutiques où se déroulent des choses pas très claires. On peut se faire un parcours du New-York du crime, avec ses clochards, ses médecins, ses planques, etc. D’ailleurs, on a un peu l’impression que le New-York de John Wick semble totalement dépourvu d’habitants normaux et ordinaires : ici, il n’y a que des tueurs. Ils surgissent de partout, tous reliés à l’administration de la Haute Table, ce gouvernement du crime organisé qui peut condamner quelqu’un en un coup de téléphone.
Les plongées dans cette administration sont d’ailleurs assez fascinantes. Il y a même une bourse aux contrats, dont la valeur augmente selon la difficulté, etc. On a même toute une mythologie du crime avec sa figure du Fondateur.
L’esthétique d’un côté, l’univers de l’autre : John Wick ne se contente pas d’enfiler les combats mais impose ses codes et crée son monde. D’où son succès, mérité.