Arthur Flex arpente les rues sales de Gotham City dans son costume de clown pour le compte de quelques enseignes fauchées. C’est alors que des délinquants l’agressent, laissant l’individu allongé sur l’asphalte. Celui qui souffre de crises de rire incontrôlées et dont la mère préconise un sourire pour embellir toute situation, ne sera-t-il jamais ce grand comique médiatique qu’il rêve de devenir ? Un homme est mort, une étoile noire est née.
D’une audace inédite, le brûlot de Todd Phillips réussit l’exploit de sortir DC de sa terrible gueule de bois. En choisissant d’investir la personnalité trouble du futur Joker, le plus souvent réduit à jouer les pendants machiavéliques du justicier masqué, il rebat les cartes avec ruse et intelligence. La chauve-souris n’est ici qu’un enfant laissé l’air hébété derrière des grilles. Les amateurs tenaces d’affrontements explosifs n’auront droit qu’à quelques pétards mouillés. Le super-héros est ailleurs, redevenu humain.
Incarné par un Phoenix voltigeant au milieu des cendres, c’est un malade né d’une mère abîmée ou corrompu par une société sans cœur ? Celle-là même qui écrase sur le carreau à coups de piques budgétaires mal senties, ces tristes "clowns qui n’ont rien su faire de leur vie". Appel à la révolte en marche ou dénonciation de cette violence quotidienne marquée par l’irrespect d’autrui ? Entre hier et aujourd’hui, les repères filmographiques se dérobent. L’orange mécanique de Kubrick injecte son poison, les pantins valsent comme chez Scorsese et les « poings » d’interrogation de Fincher imposent le délire schizophrénique : suis-je fou ou est-ce le monde autour qui le devient ? Joker.
8.5/10
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