Alors même que je m’apprête à écrire sur Judas and the Black Messiah, je vois ce titre dans mon fil Facebook « À Minneapolis, la mort d’un automobiliste noir abattu par la police ravive les tensions ».
Dire que ce genre de film est toujours d’actualité devient une lapalissade. Et ça en est désespérant.
Ignorant l’histoire du mouvement des Black panthers, je découvre donc une partie de celle-ci.
Fascination, colère et écœurement sont au menu. Je m’y attendais.
Toutefois, deux éléments de l’histoire de Fred Hampton sont particulièrement troublants et passionnants. Lumières et ombres d’une même époque.
Tout d’abord, la lumière, celle de la Rainbow Coalition. Fred Hampton a réussi à fédérer les Black Panthers (organisation noire), la Young Patriots Organization (organisation blanche de Sudistes) et les Young Lords (organisation hispanique), auxquelles s’ajoutent des gangs de rue. Cette « coalition de l’arc-en-ciel » veut réunir une « armée des pauvres », selon Cha Cha Jiménez des Young Lords. J’ignorais ces rapprochements et cela m’offre une vision moins manichéenne de ces mouvements.
L’ombre, c’est celle du COINTELPRO (Counter Intelligence Program). Sous la direction de J. Edgar Hoover, ce programme de contre-espionnage du FBI aurait conduit à l’assassinat de 27 membres du Black Panther Party ainsi que 69 membres de l'American Indian Movement.
Mais revenons-en au film Judas and the Black Messiah. Globalement, Shaka King offre une mise en scène impeccable et se permet même quelques beaux moments de cinéma (la sortie de prison est remarquable).
L’enjeu du film réside dans le rapport entre l’indic du FBI Bill O'Neal (interprété par Lakeith Stanfield), le Juda donc, et Fred Hampton (Daniel Kaluuya), le Messie noir.
Il est d’ailleurs amusant de constater que les deux acteurs concourent aux Oscars dans la catégorie du meilleur second rôle. Comme si aucun des deux n’avait le premier rôle.
Certes, leur présence à l’écran et leur importance sont à peu près égale. Lakeith Stanfield offre un jeu juste, faisant percevoir ses doutes et ses contradictions juste pas son regard et son attitude. Mais l’interprétation de Daniel Kaluuya l’écrase, tant il a du charisme. Mais peut-être-ce là l’effet voulu, pour montrer la différence entre les deux antagonistes. Les moments de discours de Daniel Kaluuya sont incroyables et je vous conseille de voir un discours du vrai Fred Hampton pour comprendre ses qualités de tribun.
J’ajouterai deux petites surprises dans le générique de fin (ne vous inquiétez pas, no spoil) :
- Martin Sheen interprète J. Edgar Hoover. Il est méconnaissable
- Dans les images d’archives utilisées, il y a le « Black Panthers » d'Agnès Varda. Une bonne motivation pour enfin le voir
Au passage, un article sur Fred Hampton pour en apprendre un peu plus.