Les Wachowski sont des cinéastes qui divisent, certains voient en eux de véritables génies tandis que d'autres ne voient qu'en eux un cinéma vide et prétentieux. Personnellement je pense que la vérité est ailleurs et qu'au final personne ne comprend véritablement les Wachowski. Oui ce sont de brillants metteurs en scènes, il n'y a aucun doute là dessus mais ce ne sont pas de brillants cinéastes, j'ai un avis assez tranché sur eux qui n'ont pour moi jamais été capable d'offrir un cinéma pleinement original et révolutionnaire comme certains ce plaisent à le dire. Leur premier film Bound était un polar esthétique réussi qui disposait de bonnes idées mais assez timide au final, Matrix était un bon film mais pas le film culte qu'il est devenu. Ayant découvert Dark City bien avant celui-là j'ai été moins touché par son message, qui empruntait beaucoup trop à Dark City même au niveau de l'esthétique, surtout que ce dernier est un film bien plus intelligent et inventif que ne l'était Matrix. Et depuis lors je ne vois qu'en Matrix un film d'action simpliste, certes esthétiquement innovant mais au fond très léger. Les suites de ce dernier bien plus ambitieuses peut être même trop, tombant en décrépitude avec un deuxième opus qui ne savait pas trop comment jongler avec film d'auteur et divertissement pur et le troisième qui tombait dans le n'importe quoi aux scènes d'actions molles et bien trop longue, assurément le plus mauvais film des Wachowski. Ensuite vint Speed Racer, film enfantin qui malgré une esthétique qui en jetait était bien trop simpliste et vide dans ce qu'il essayait d'entreprendre surtout que le film tombait pour le coup trop souvent dans le mauvais goût. Ensuite arriva le fameux Cloud Atlas qui déchaîna les passions et qui comme pour Jupiter Ascending est un film symptomatique des Wachowski et de leur style. Ces deux films sont clairement les deux faces d'une même pièce qu'il pourrait presque formé un diptyque.
Le cinéma des Wachowski parle de la vie, c'est leur principal thème qui englobe l'amour, la réincarnation et la consommation. Dans Cloud Atlas qui est le film le plus existentialiste des cinéastes tout cela culminaient pour un rendu bancal, comme toujours les Wachowski étaient trop ambitieux et le film n'arrivait pas à approfondir chaque thématiques qu'il voulait traiter, ce qui en faisait un film formellement brillant, mais sur le fond incomplet et trop simpliste, ce qui fait que le film échouait dans ses intentions. Et globalement chaque films des Wachowski suit ce schéma, quelques choses d'ambitieux mais peut être trop ambitieux pour être pleinement réussi. Le problème est que ce sont des cinéastes généreux et dans cette optique ils font leur films sous le signe du trop, ils veulent bien trop en mettre sur des fondations fragiles ce qui fait que généralement l'ensemble fini par ce casser la gueule. J'aime bien ces deux cinéastes personnellement, je sais qu'avec eux je vais toujours en prendre plein la vue mais leur films s'agencent souvent de façon à ce que ce soit de l’esthétique pour de l'esthétique pur mais l'esthétique aussi soigné et impressionnant puis-t-il être ne fait pas nécessairement un bon film. Ici ça en est l'exemple parfait car comme Cloud Atlas, Jupiter Ascending est la synthèse du cinéma des Wachowski, que ce soit dans les qualités comme les défauts, ce qui fait un film visuellement impressionnant mais globalement moyen.
Pour ce qui est du scénario, c'est un ensemble de choses pris à droite à gauche, on a du Star War, du Dune, du Mass Effect ( d'ailleurs de manière totalement gratuite je me permet de dire que pour moi c'est l'oeuvre de Space Opera la plus aboutie qui ait vu le jour, ou quand le jeu vidéo détrône le cinéma ), du Cendrillon, etc. On pourrait résumer le film par un conte de fée spatial avec son intrigue simpliste et déjà-vu rendant l'ensemble incroyablement prévisible, des dialogues digne d'une bleuette adolescente, des personnages inconsistants et un manque cruelle d'originalité. Le film étant plus dans la référence et l'hommage il ne présente finalement rien de nouveau ou de révolutionnaire dans le genre, ce contentant de faire du classique style pop culture des années 80. Sinon le film est beaucoup trop ambitieux, voulant faire un scénario dense, il multiplie les personnages et les sous-intrigues que parfois cela peut perdre le spectateur surtout que le plus infime des personnages à un rôle à jouer parfois même de façon importante. Il est juste dommage que cela étant le film ne fait que survoler les intrigues politiques ou la psychologie des personnages comme la richesse de son background au profits des scènes d'actions et une caractérisation de l'ensemble assez cliché. De plus la même situation s'enchaine encore et encore ce qui fait que le film devient répétitif et bien trop linéaire car en gros dans le film Caine doit sauver Jupiter, il la sauve fin du premier acte, Jupiter se fait enlever, Caine doit la sauver, il la sauve fin du deuxième acte puis rebelote pour le troisième. Les enjeux dramatiques et les motivations des trois méchants sont tout le temps les mêmes, on a un effet de redite qui devient agaçant. Sinon le film se pare parfois d'un humour bien senti, les thèmes de Wachowski reste assez intéressant même si leur traitement est très similaire à Matrix et la petite critique du système bureaucratique, même si elle ne révolutionne rien, est fort sympathique. Malheureusement le manque d'identité de l'ensemble ainsi que l'absence totale de charisme chez les personnages ( ce sont les méchants les plus insignifiants que j'ai vu ) font que l'ensemble reste trop générique.
Le casting est globalement mauvais les seuls à tirer leurs épingles du jeu sont Sean Bean encore une fois impeccable et Channing Tatum assure le spectacle malgré son charisme d’huître. Comme quoi l'absence de charisme prouve bien que cela n'empêche pas d'être un acteur correct. Sinon Mila Kunis est vraiment insignifiante, elle n'arrive jamais à faire culminer les enjeux émotionnels de son personnage, elle n'a clairement pas les épaules pour être l’héroïne d'un tel film tandis que Douglas Booth est risible et que Eddie Redmayne est ridicule dans son cabotinage, essayant de se la jouer Marlon Brando version Godfather. Le reste des acteurs sont du même acabit mais notons néanmoins le caméo sympathique et réussi de Terry Gilliam.
Pour ce qui est de la réalisation la photographie est plutôt réussie tandis que les effets spéciaux sont vraiment impressionnant, même si la plupart des intérieurs sont génériques comme les races extraterrestres ou les planètes mais ce qui est design de vaisseaux ceux-ci sont vraiment inventifs. Le montage est classique et la musique de Michael Giacchino est correct mais elle manque cruellement d'un thème principal fort. Pour ce qui est de la mise en scène des Wachowski, celle-ci est virtuose, la composition des plans est bien pensé, les scènes d'actions sont ingénieuses, bien découpées et lisibles et elle bénéficie d'un souffle épique indéniable. C'est dommage que celles-ci soient néanmoins construite de la même façon à savoir le sauvetage du dernier instant et que la meilleure scène du film soit la première, une course poursuite à Chicago entre ciel, terre et mer vraiment inventive et ludique dans sa manière d'être mis en scène. Après ça le film nous laisse un peu de marbre dans ses scènes d'actions, on ne retrouve pas ce même frisson comme si on était blasé avant l'heure malgré la qualité de l'ensemble.
En conclusion Jupiter Ascending est un film moyen mais formellement inventif, même si les visuels sont déjà-vu, le film ne réinvente pas la SF mais la manière dont il la met en scène est clairement virtuose. Mais comme pour tous les Wachowski c'est le reste qui peine, entre un scénario relativement naïf et maladroit malgré son ambition et sa densité. L'ensemble manque clairement de charisme et d'identité et plus que jamais les Wachowski impose leur grammaire cinématographique si particulière, une grammaire intéressante mais imparfaite. C'est comme à leur habitude un cinéma de surface, incroyablement beau mais assez vide malgré ce qu'ils aimeraient nous faire croire, car lorsque que l'on creuse un peu entre les divers influences, les références et les thématiques légèrement traitées, il ne reste pas grand chose.
Frédéric_Perrinot
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le 7 févr. 2015

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