Philippe Labro a eu plusieurs vies : présentateur (généralement le dimanche en deuxième partie de soirée sur la 8), romancier, parolier (Oh ma jolie Sarah pour Johnny Hallyday notamment) et même réalisateur. Une dernière carrière parfois un peu trop oubliée au regard des dits films. Ce n'est pas la première fois que Labro tournait avec Jean-Paul Belmondo, mais contrairement à l'époque de L'héritier (1973), l'acteur est désormais producteur de ses films.


De même, c'est la période où il commence à cumuler les rôles d'hommes d'action et L'Alpagueur ne dérogera pas à la règle. Il incarne un chasseur de primes sur diverses missions, s'attaquant aussi bien à des policiers corrompus qu'à du gros gibier. Ce dernier n'est autre que l'Epervier incarné par Bruno Cremer. Comme sur Le Marginal (Jacques Deray, 1983) avec Henry Silva, le duel Bebel / Cremer se fait à distance avant le grand final avec son lot d'intermédiaires liquidés. Ce qui permet de bien cerner les deux adversaires.


L'Alpagueur est un type solitaire multipliant les traques diverses avec une facilité déconcertante. Néanmoins, la relation qu'il entretient avec le complice de Cremer (Patrick Fierry) montre qu'il n'est pas qu'une machine à tuer et il lui sauvera plusieurs fois la mise au cours du film. Le final ira d'autant plus dans ce sens, montrant que son attachement pour le gamin n'était pas feint. L'Epervier est tout le contraire : il se sert de ses jeunes complices (et même plus si affinité au vue de certains aspects sous-entendus) et les dessoude une fois qu'il a fini. Son but ? Passer totalement incognito aux yeux de tous, quitte à liquider le plus de témoins sur son chemin. Cremer apparaît même par moments comme un sacré prédateur, s'amusant avec sa proie jusqu'au bout. L'affrontement entre les deux tueurs n'en sera que plus intéressant.


Même si l'humour est là, les victimes s'accumulent sur leur chemin notamment lors d'une bonne fusillade dans une auberge (ce qui ne manquera pas de rappeler le Guet Apens de Sam Peckinpah sorti quatre ans plus tôt). Belmondo et Cremer sont convaincants et tout en retenue, le premier étant loin de partir dans certains aspects cabotins de son jeu habituel de l'époque.


Comme pour aller dans le sens du récit, L'Alpagueur se déroule dans une ambiance brumeuse, l'éclaircie étant rare. Un aspect grisâtre qui correspond parfaitement à un film d'action un peu à part pour Bebel, le genre où il ne sortira pas une multitude de punchlines. La non-présence de Michel Audiard (qui signera bons nombres de dialogues pour l'acteur par la suite) au scénario tend à le confirmer et ce n'est pas un mal.


L'Alpagueur ne fut pas un énorme succès (1,5 million de spectateurs) et ce n'est pas forcément un des films les plus connus de Bebel produits durant les 70's. D'ailleurs, même Labro n'est pas totalement convaincu de son film. Néanmoins, on lui préféra largement ce cru au bordélique Incorrigible (Philippe de Broca, 1975) sorti quelques mois plus tôt.

Borat8
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le 15 janv. 2022

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