Tellement près et tellement loin du chef-d'oeuvre. Siri s'est pourtant donné les moyens de donner naissance à son grand film de guerre. Sur ce plan c'est vrai, on n'a jamais filmé la guerre comme ça en France, et le film a le mérite d'être l'un des trop rares à avoir osé aborder le sujet encore incroyablement tabou de la Guerre d'Algérie, et à reconnaître les atrocités commises au nom de la République. Encore une fois, Siri adopte une mise en scène en forme de crescendo, bardée de plans somptueux, et prouve qu'il est le meilleur en France pour filmer les échanges de tirs.
Mais en tant que premier grand film de guerre français, L'Ennemi Intime se trouve écrasé par l'ombre du panthéon hollywoodien. Trop respectueuse des codes établis depuis des décennies par les réalisateurs américains, la trame perd en originalité ce qu'elle gagne en puissance de dénonciation et l'impression de déjà vu se fait pas mal sentir. La déchéance psychologique de Terrien (Magimel, mauvais dans l'ensemble), trop rapide, trop prévisible, est l'un des échecs cinglants du film. D'un autre côté, tout ce qui est dit sur la Guerre d'Algérie, et par extension sur la violence et la guerre en général, sonne très juste.
Pas le grand film tant espéré donc, mais un geste politique qui va évidemment compter dans l'histoire du cinéma français.