La paranoïa ludique d’Eagle Eye finit par rallier ce film prétendument à thèse au système qu’il entend dénoncer, à savoir le règne d’une intelligence artificielle et la mécanisation des hommes qu’elle exploite, réduits à de vulgaires corps en course. Tout ici est programmé en pilote automatique, obéissant aux codes du blockbuster hollywoodien sous perfusions Michael Bay : les scènes d’action s’avèrent à ce point charcutées par le montage que nous n’y voyons goutte et n’y comprenons mot, l’originalité d’un héros jumeau ne sert qu’à faciliter une reconnaissance oculaire, rebondissement parmi d’autres qui relancent sans arrêt l’intrigue et réveillent, par secousses sonores et visuelles, le spectateur endormi.
Le long métrage paraît constamment en train d’atteindre une acmé qu’il repousse encore et encore sans percevoir qu’il ne fait que se heurter à un plafond de verre ; autrement dit, sa gesticulation insupportable produit une impression inverse d’immobilité ou de sur-place. N’oublions pas cet incessant compte à rebours qui manque de causer crises cardiaques ou démissions des personnages : « vous avez trois minutes », « il vous reste six minutes sinon votre enfant disparaîtra », « 23%, 25%, 27% » et j’en passe… Artifice grossier parce qu’il est exploité ad nauseam, à l’instar du thème musical de Brian Tyler. On en ressort lessivés, à peine divertis.