Second métrage d’Alexandre Castagnetti en moins d’un an, La Colle est la bonne surprise de cet été. Adolescence, romance, musique et bande dessinée : tout ce qui caractérise l’univers du réalisateur est judicieusement mixé pour un résultat plus crédible et moins naïf que Tamara.


LA COLLE c’est l’histoire d’un ado typique, Benjamin (Arthur Mazet) complexé et peu sur de lui, et secrètement amoureux d’une jeune fille de son lycée, Leila (Karidja Touré, l’étoile montante révélée par Bande de filles). Un soir, seul devant son ordinateur, Akinator – le génie du web – lui propose de réaliser un de ses vœux. Ben demande à ce que Leila et lui soient « ensemble » juste avant de s’apercevoir qu’il n’était pas connecté à internet (ce qui n’est pas sans rappeler la fameuse scène de Big où Tom Hanks fait un vœu devant une machine à souhaits allumée alors qu’elle est débranchée). Le lendemain, il se retrouve en colle malgré lui avec les pires cancres de son lycée mais aussi avec Leila. A sa grande surprise, chaque fois qu’il se séparera d’elle plus de trois minutes, il revivra cette heure de colle depuis le début, coincé dans une boucle temporelle infernale…


Les spécimen avec lesquels Benjamin va revivre sans cesse cette heure de colle interminable
Une fois de plus Alexandre Castagnetti souhaite casser les codes et alerter sur les préjugés que l’on se crée afin de laisser une chance à chacun. Il met à l’honneur la thématique du groupe, la nécessaire tolérance et l’ouverture qui permettent le vivre-ensemble, loin des apparences souvent trompeuses et réductrices. Une idée noble mise en scène d’une façon moderne et intelligente qui touchera le plus grand nombre. Bien entendu, les adolescents sont les premiers visés par LA COLLE car il dépeint la dureté des relations entre eux, leur univers social, les stéréotypes : le geek, l’intello bobo, le caïd (à noter et saluer le fait que ce soit ici une fille), le playboy, etc… Mais en dehors des situations cocasses, il illustre avec humour ce qui bloque dans ce microcosme et dans notre société en général (les étiquettes) et incite chacun à mettre en avant sa vraie personnalité et ses talents pour s’en sortir. Par exemple, pour Benjamin, ce sera sa passion pour les BD et ses talents de dessinateur. A coup de slogans sur des airs de hip-hop entraînants, ces gosses là balancent des mots simples mais efficaces dans leur contexte « On s’colle des étiquettes, qui nous collent à la peau, on s’colle des étiquettes, on s’cache derrière des mots ».


S’il peine un peu à démarrer, LA COLLE balance crescendo une énergie communicative à laquelle on ne s’attend pas du tout. Dès les premières minutes on se demande plutôt par quelle habile pirouette Castagnetti va bien pouvoir nous sortir de l’ennui en nous proposant de revivre la même scène pendant près d’une heure trente, qui plus est sans plagier l’excellent Un jour sans fin. Fort heureusement, il y parvient, et de façon originale, même si l’on retrouve, entre autres, l’idée commune d’une épreuve initiatique pour le protagoniste. Le jeune réalisateur maintient avec intérêt dans cette aventure loufoque grâce à une galerie de personnages secondaires hauts en couleurs et extrêmement pertinents (comme c’était déjà le cas dans Tamara) mais aussi grâce à une romance loin d’être niaise et une bande originale assez géniale.


A travers une palette de personnages attachants, à l’instar de la BD que son protagoniste écrit au fil de l’histoire insensée qu’il vit, Alexandre Castagnetti décloisonne les domaines traditionnellement attribués à chacun et prend non seulement acte des changements qui s’opèrent au sein de notre société mais les encourage. Des filles qui trouvent « trop classe » un beau gosse qui, sous ses airs de leader, se passionne pour la danse classique, en est un exemple parmi d’autres, tout aussi sympathiques.


C’est ainsi que LA COLLE se positionne en film aussi moderne et utile que les messages qu’il véhicule et sa façon de les transmettre. Punchy, drôle et créatif, ce casse tête temporel est sans doute la meilleure proposition d’Alexandre Castagnetti. Et pour le souffle positif qu’il insuffle au spectateur, on a bien envie de lui dire merci !


Par Stéphanie Ayache pour Le Blog du Cinéma

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le 2 août 2017

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