Encore une biopic après The Lady et J. Edgar. Allons-nous nous rapprocher du film de Clint Eastwwod ou celui de Luc Besson ? Un peu des deux en fait. De J. Edgar, on récupère cette alternance entre le passé et le présent où Meryl Streep à l'instar de Leonardo DiCaprio joue le personnage dans deux époques, version jeune et version âgée à l'aide de maquillages. Déjà un premier point positif, le maquillage est bien plus réussi que celui d'Hoover malgré des rides solides au niveau du menton alors qu'elles devraient être flottantes.

La différence entre The Lady et J. Edgar réside dans leur capacité à raconter une histoire au-delà du simple biopic traditionnel. Le long-métrage de Luc Besson était surtout une formidable histoire d'amour ayant réussi à surmonter l'Histoire tandis que celui d'Eastwood revenait parfois maladroitement sur la liaison trouble qui unissait Hoover à son numéro 2 mais n'en faisait pas le cœur de son récit, ne se contentant que d'y revenir de temps à autre au gré des voltiges du temps. En fait, J. Edgar multipliait les sujets et y perdait un peu de force tout au contraire de The Lady.

Pour notre plus grand bonheur, La Dame de fer se rapproche davantage de l'Orchidée de fer (surnom donné à la Lady). Mais grosse surprise, c'est davantage un constat cinglant sur la fin de vie, sur une dame qui avait été au sommet d'un pays et qui se retrouve seule dans sa maison. Son fils n'a pas le temps d'aller la voir, son mari a été emporté par un cancer voilà des années. Ce scénario signé par Abi Morgan est un petit bijou, point étonnant de la part de cette femme qui a signée celui d'un des chefs d'œuvres de 2011, Shame. On guettera avec impatience son prochain, The Invisible Woman réalisé par Ralph Fiennes. Surtout Abi Morgan ajoute un trait scénaristique qui évite le film de tomber dans un délire contemplatif souvent chiant à savoir les hallucinations de Margaret Tchatcher: elle voit toujours son mari, joué par un bon Jim Broadbent. Des traits d'humour apparaissent alors subtilement lors de leurs dialogues et offre une légèreté dans ce script permettant de contrebalancer les moments graves et tragiques, un yoyo émotionnel efficace pour ce travail de deuil et de nostalgie.

L'autre performance concerne celle de Meryl Streep, presque méconnaissable si ce n'est son nez et ses yeux. Du diable qui s'habille en Prada, elle bascule vers une autre femme, jadis haïe et adorée, jadis traitée de sorcière et considéré comme une mère protectrice (autoritaire mais bienveillante), Margaret Tchatcher n'avait laissé personne indifférent et surtout, elle est arrivée à la tête du pays durant une de ses périodes les plus sombres de son histoire. Meryl Streep l'incarne à merveille, à tel point qu'au bout de cinq minutes, on oublie Meryl et on ne voit plus que Margaret.

Meryl Streep se chargera d'incarner la Dame de fer durant deux époques, durant sa grande carrière politique et à la fin de sa vie. Ce voyage dans le temps, pourtant parfois casse-gueule, est bien aidé par une réalisation quelque fois bancale mais aussi magnifique, en témoigne la scène vibrante de la sortie de Margaret Tchatcher de 10 Downing Street.

SPOILER
On y voit les pieds de Tchatcher marcher le long des roses allongées sur chaque côté pour former un chemin la menant à la sortie. Le tout aidé par une musique poussée à son maximum. Véritable témoignage de la fin du règne d'une grande dame qui sort avec les honneurs.
FIN SPOILER

Aussi la réalisatrice a pris le risque de diffuser des images d'archives. Si parfois, cela a pour conséquence de nous rappeler que le film n'est qu'un film, cela permet aussi de visionner des images d'une ampleur inouïe et surtout impossible à reproduire par le cinéma sous peine d'exploser le budget.

Meryl Streep n'est pas la seule à incarner la Dame de Fer, Alexandra Roach l'incarne lors de sa prime jeunesse, à l'aube de sa carrière politique. Elle marque aussi le début de son idylle avec son futur mari, Denis Thatcher. Ce passage est une vraie réussite grâce à la performance de la jeune Alexandra Roach et surtout Harry Lloyd incarnant un Denis Tchatcher facétieux mais l'apothéose survient durant la scène de la demande en mariage. Un moment qui aura réussi à me faire arracher des larmes car elle permet non seulement de voir l'amour qu'ils se portaient mais aussi la détermination de Margaret Tchatcher à s'imposer dans ce milieu d'homme, à montrer la voie à tous les femmes. Car la Dame de fer, on l'oublie souvent, est aussi la première femme à être à la tête d'un pays en Occident. La réalisatrice aura su montrer son isolation au gré de superbes plans iconiques et faire ressortir le côté épique de son sujet.


Conclusion :

Une superbe vision sur la vieillesse et le deuil permet à ce biopic de s'affranchir du simple cours d'histoire. La Dame de fer livre le portrait d'une femme sur les trois axes de sa vie, du crépuscule à l'aube et témoigne l'impact que la grande Tchatcher a eu sur la Grande-Bretagne à son époque.
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le 13 janv. 2012

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