La machine à explorer le temps est un chouette petit film de science fiction qui transportera le spectateur non pas très loin mais très tard. Ayant lu le livre je ne pourrai m'empêcher de comparer les deux œuvres; c'est d'ailleurs une problématique intéressante, tant je ressens que le livre influe sur mon jugement. J'espère néanmoins rester pertinent dans mes propos.
Lorsqu'il y a adaptation, le réalisateur voit deux choix majeurs possibles: se réapproprier totalement l'histoire (au risque de décevoir) ou rester fidèle (au risque également de décevoir). Le remake (ou seconde adaptation) sorti plus récemment est plus libre dans les thématiques, puisque la raison du voyage dans le temps est toute autre (je suis d'ailleurs déçu que tout tourne autour d'une histoire d'amour un peu bidon... en fait trop de films tournent un peu trop autour de l'amour aujourd'hui. Pourquoi ne pas garder la curiosité scientifique comme fil narratif? est-ce si dépassé ou si peu identifiable par rapport au public actuel?).
Cette première version, en revanche, reste assez fidèle au livre. Et là aussi je suis déçu. Déçu car le réalisateur est trop fidèle ; du coup, il prend des raccourcis faute de temps ; un livre de 120 pages peut se révéler plus riche en information qu'un film de 120 minutes. A cause de cela, certaines conclusions sont trop vite expédiées et le spectateur ne peut autant s'investir dans la psychologie du scientifique au fur et à mesure de ses désillusions sur l'humanité. Ainsi on sent la volonté de garder intact l'esprit du livre, mais le réalisateur n'y arrive pas avec autant de force et d'ingéniosité, car il se voit trop limité.
En soi, le scénario n'est pas mauvais. Sans avoir lu le livre, je pense que l'on ressent cette hâte dans l'enchaînement de certaines scènes, mais le déroulement de l'histoire reste tout de même plausible et divertissant dans son ensemble. On se prend même d'excitation pour le voyage temporel surtout lorsque notre héros s'arrête et découvre le futur à différentes époques. Les personnages sont plutôt bien construits. Le scénariste, en donnant l'usage de la parole aux Elois (ou plutôt, pour être précis par rapport au livre, les Elois parlent toujours anglais, il n'y a donc plus cette longue phase d'apprentissage du dialecte ni les incertitudes de traduction du héros), s'est tout de même autorisé le luxe de quelques très bons dialogues. Comme quoi il y a tout de même de la réappropriation, bonne qui plus est, dans cette adaptation. On reprochera peut-être de trop grandes faiblesses aux Morlocks, à la fois très bêtes et très faibles ; ils n'ont rien pour eux les pauvres. Il est même difficile de croire qu'ils sachent utiliser les machines dans leurs caves tant ils semblent dépourvu de toute forme d'intelligence. Et en plus ils meurent après deux coups de poing. Les rendre plus résistants, au moins, ou plus fourbes (comme dans le livre en fait) aurait augmenté le suspens du film.
La mise en scène est assez classique, très théâtrale dans son découpage (plans d'ensemble, quelques plans moyens avec travelling qui suit, et très rarement un gros plan). C'est un peu dommage. La lumière est correcte, les couleurs belles, mais j'attendais un travail plus ingénieux par rapport aux possibilités qu'offre le médium. En même temps ça reste un film pop corn, et la plupart des films de ce genre de l'époque sont tournés ainsi (si ça peut servir d'excuse).
Bref, le film reste un bon divertissement, il y a de bonnes scènes, mais hélas pas aussi palpitantes que dans le livre (je pense notamment à la scène de la bibliothèque absente du film, et l'écriture d'origine pour l'intrusion par le puit nettement plus flippante). Je recommande donc le film à condition d'aimer les films un peu vieux, qui peuvent faire sourire par le kitsch aujourd'hui et surtout à ceux qui ne sont pas insensible au charme de Yvette Mimieux (waw justement le dialogue de fin où elle fait montre de jalousie, elle est tellement mignonne d'innocence).