Je ne sais pas si La maison de la radio sera le dernier documentaire de Nicolas Philibert, mais il forme une boucle avec ses débuts, La voix de son maitre, sorti en 1978.
Dans ce dernier, on entendait des PDG, et leurs voix alors qu'ils paraissaient inaccessibles, et ici, Philibert filme les voix derrière les radios du groupe Radio France, en l'occurrence les animateurs mais également les gens de l'ombre, les techniciens, les musiciens, afin qu'on puisse comprendre comment tout ça fonctionne.


Il en résulte un film très intéressant, car la grande qualité de Philibert est qu'il n'intervient jamais, aucune voix off, et sa caméra laisse penser qu'il a eu un don d'invisibilité ; on dirait qu'à quelques gens près, personne ne se sent filmé.
On assiste à la fabrication d'émissions, les comités de rédaction, mais aussi à des réunions entre un jeune animateur qui se fait reprendre par sa supérieure sur le ton à donner pour lancer les infos, ou alors un duo d'ingénieurs du son qui travaillent la voix d'un récitant, comme on entend parfois sur France Culture, où on entend des histoires.
Le mérite du documentaire est de montrer l'énorme charge de travail qu'ont les employés dans cette Maison, constamment sur le qui-vive, à l'image de cette femme (sans doute secrétaire de rédaction) qui recueille les informations par téléphone, mais dont la seule préoccupation est de savoir, à propos d'un accident mortel survenu à l'étranger, comment la victime est morte ; décomposée ou coupée en morceaux ? Plus étonnant, il y a même un bruiteur, qu'on voit partir dans la forêt enregistrer des sons pour nourrir des histoires à la radio et leur donner plus d'authenticité.
La musique a également une place importante, avec des extraits d'enregistrements de concerts, et des entretiens avec des responsables musicaux, notamment Frédéric Lodéon (qui s'occupe du classique sur France Musique) qui, filmé comme il l'est, donne l'impression qu'il va être englouti par les milliers de cd qui l'entourent !


Il y a aussi un travail sur l'ambiance tamisée qui se dégage de certaines émissions, surtout celles de nuit, notamment un joli moment entre Alain Weinstein (Du jour au lendemain, émission supprimée depuis) et une jeune écrivaine totalement paralysée par le trac, et qui ne sait pas quand parler. Alors, on la voit se chercher, prendre confiance en elle, mais la parole ne vient pas, ne laissant que de la musique entre les deux. Ou alors une autre émission nocturne sur une radio de France Bleu où les auditeurs dédicacent des disques pour des proches.


Il en résulte un très joli film, sans doute destiné aux amoureux de la Radio, et à part quelques noms connus comme Albert Cohen (qui fait les matinales sur France Inter, et donne l'impression de ne jamais dormir), personne n'est nommé, ni-même sa fonction. Mais, au fond, ça se devine facilement.
Personnellement, je regrette qu'on ne voit aucune émission de cinéma, notamment un enregistrement de Projection ou du Masque et la Plume.

Boubakar
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le 18 oct. 2016

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