Été 1960, une colonie de vacances. Marc (Patrick Dewaere) et Philippe (Patrick Bouchitey) sont deux jeunes moniteurs que tout oppose. Enfin en apparence du moins. Le premier est un tonitruant gaillard à l'humour bravache et bourrin, le second un intellectuel à la gracilité réservée. L'un est aussi costaud et fruste que l'autre paraît sensible et vulnérable. Quand Marc surprend Philippe habillé en femme dans sa chambre, une curieuse relation va s'installer entre eux. Il s'agit donc bien là, comme ce sera souvent le cas plus tard chez Claude Miller, d'un drame intimiste fondé sur l'affrontement de deux personnalités très différentes. Entre accusations muettes et vraies-fausses invitations tacites, leurs rapports évoluent selon un sado-masochisme à peine latent où le rôle de chacun ne sera pas toujours si clairement défini...
Car sous la virilité exacerbée du beau Marc et son goût pervers pour la manipulation semblent bientôt poindre un désir et une curiosité refoulés.
Le film donne la part belle à l'imagination du spectateur et à son interprétation des non-dits jusqu'à ce que la situation atteigne un paroxysme explicite dans la très belle avant-dernière scène où la bête traquée et acculée prendra très symboliquement sa revanche sur le torero bas du front qui l'agace, après une danse libératrice.
Si l'univers des colonies de vacances n'est qu'une toile de fond du récit, le milieu et l'ambiance n'en demeurent pas moins savoureusement dépeints, notamment grâce au concours de seconds rôles mémorables ; Michel Blanc, le mono fayot obsédé sexuel et Claude Piéplu, hilarant directeur infatué de pédagogie et de morale surannées. Pour ce qui est de nos deux rôles principaux, Patrick Bouchitey impressionne dans un rôle casse-gueule qui l'étiquètera "inverti" aux yeux du cinéma français pendant de longues années.
Quant à Dewaere, il parvient à rendre son personnage à la fois antipathique et attachant, monstrueux et fragile. La subtilité de son jeu dans un rôle aussi bruyant et agité est bluffante. Leur duo fait merveille.
Un film très intéressant bien que forcément imparfait mais remarquablement maîtrisé pour un premier long-métrage.