La Nina de Fuego avait surpris son monde il y a quelques mois en étant sacré au Festival de San Sebastian. Pedro Almodovar himself y est allé de son hommage en parlant, excusez du peu, de « la révélation espagnole de ce siècle ». Certes, les plus chagrins/observateurs d’entre vous ne sauront pas forcément citer plus de cinq noms que l’on pourrait qualifier de révélation espagnole de ces dernières années. Mais le second long métrage de Carlos Vermut (après Diamond Flash qui était passé plus inaperçu sur la scène internationale) témoigne d’une vraie personnalité de cinéaste, ce qui ne court pas nécessairement les plannings de sorties surchargés de films parfois interchangeables. Que vous aimiez ou détestiez La Nina de Fuego, vous serez d’accord pour dire que ce que vous avez vu n’a rien de banal.


Comment parler d’un film aussi mystérieux sans déflorer ses secrets ? Une réplique de La Nina de Fuego sur l’Espagne qui n’aurait pas réglé son conflit entre raison et émotion sert de première piste. Dans La Nina de Fuego, la crise apparaît en filigrane, mais elle est là. Les bouquins se vendent au poids – peu importe ce qu’il y a dedans. La seule vérité dit-on est mathématique. Pourtant, tout échappe aux personnages de La Nina de Fuego, comme échappe la dernière pièce d’un puzzle interminable et qu’on pense avoir enfin assemblé. Une pièce manque, et on ne voit plus que cet interstice noir.


Que se passe t-il dans la salle d’à côté ? Qu’y a-t-il derrière cette porte redoutée ? La Nina de Fuego n’est pas un film de poseur où le mystère est une question de tour de passe-passe. Par la force de sa mise en scène, par une prise de risques gonflée (ici, on ne tiendra jamais le spectateur par la main pour tout lui expliquer), Vermut parvient à un authentique sens du mystère, à un vrai vertige de cinéma. Il y a le film qu’on voit, et le film mental que chacun peut construit en soi. Le cinéaste dit notamment s’être inspiré du cinéma coréen, on retrouve en effet ici cette folie noire sans limite où l’on perd pied au moins autant que les personnages. Son héroïne, incarnée avec magnétisme par Barbara Lennie dont le physique semble être un mix entre Lisa Marie et Marina Abramovic, fait osciller le film entre drame psychologique et fable horrifique. Si l’on se fait à son tempo qui n’est pas celui d’un blockbuster estival, cette fille de feu ne laissera certainement pas de glace.

John_May
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le 30 juil. 2015

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John May

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