Trouvant son inspiration formelle dans l’expressionnisme de Murnau à Einsenstein, voire la poésie de Méliès, ce film unique de Laughton rend hommage au cinéma des décennies le précédent. Il s'en détache aussi grâce à des plans somptueux, certains composants des tableaux à eux seuls. Des travellings splendides jalonnent le film, notamment ceux suivant les enfants sur terre et sur l'eau.En effet il insuffle une grâce onirique et poétique par moments, surtout dans la deuxième partie du film.
Le jeu des acteurs aussi porte en lui une réminiscence du style ostentatoire de l'expressionnisme. La plupart de l'action est centrée autour des enfants orphelins, comme cela a souvent était dit ou écrit, mais de temps en temps la réalisation se concentre sur un autre personnage, souvent féminin, comme pour exprimer différents facettes des femmes, à la fois proies et chasseresses dans le film.
Quant au fond il est tellement chargé de symbolisme animalier, réflexion sur la piété fausse ou avérée, folie et fureur des hommes, fascination pour la fausse force maligne du méchant garçon et faiblesse de la vertu des femmes, références bibliques en tous genres, en développant dans certaines des thèmes peut être ésotériques, comme celui de l'analogie entre l'histoire de Moïse et Jesus, ou une relecture du mythe d'Adam et Eve, voir une référence à Lilith, la première épouse supposée du même Adam, qu'une seule vision du film pour tout discerner est insuffisante. Le canevas biblique est le plus présent car juste avant de tourner le film, le réalisateur qui était acteur de formation, avait relancé sa carrière en faisant des lectures à travers les Etats-Unis , et notamment celle de la Bible.
Un film dense, peut être trop, et qui possède un côté "bricolé par moment" (tout simplement car son auteur a réussi cette prouesse grâce à pas mal de chance) qui fait de cette pellicule un monument et non un chef d'oeuvre, un film unique pourtant à bien des titres (en plus de ce qui été dit c'est le seul film du réalisateur), d'une singularité esthétique et d'une richesse intellectuelle rares.

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le 27 avr. 2015

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Fiuza

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