La Tour au-delà des nuages
6.1
La Tour au-delà des nuages

Long-métrage d'animation de Makoto Shinkai (2004)

Après The voices from a distant star, Shinkai s'offre enfin son premier long-métrage, et tout comme dans ce dernier, il choisit de placer son histoire dans un contexte hightech, mais cette fois-ci dans un univers alternatif post seconde guerre mondiale où le Japon est divisé en deux parties. Attaché aux concepts de séparation et de solitude, il les réutilise ici, tout en y ajoutant un côté révolutionnaire venant encore une fois rappeler les œuvres de Katsuhiro Otomo, mais aussi Mamoru Oshii, et plus particulièrement son Jin-Roh, la brigade des loups. Amitié, disparition, opposition, pouvoirs démentiels, il en faut peu pour que la production vienne flirter avec l'esprit Akira, si ce n'est que si Shinkai met tout cela en œuvre, il utilise comme toujours d'une douceur unique dans sa manière d'aborder le sujet, toujours pleine de lyrisme, de scènes toujours bien senties et d'instants de non-dits (notamment lorsqu'un avion passera et que les protagonistes seront inaudibles). Un vrai ballet visuel (avec des éléments 3D heureusement plus discrets que dans The voices of a distant star), une vraie recherche dans l'écriture (qui a plusieurs niveaux), Shinkai s'affirme une nouvelle fois et justifie à nouveau son nom parmi ceux de la nouvelle vague d'animation Japonaise.


Bref, La tour au-delà des nuages est un récit intéressant, mais moins satisfaisant que ne l'était son précédent. Shinkai a les « défauts » qu'on lui connaît, et tout comme dans son moyen-métrage met l'accent sur les décors, usant de la lumière de façon sublime (si ce n'est ses halos lumineux trop présents), ses décors sont détaillés et réalistes et les plans sont enchanteurs, mais hélas ses personnages manquent encore une fois cruellement de recherche dans leur chara-design, en particulier ses trois protagonistes, ce qui est un comble quand on en voit d'autres, secondaires, être bien plus détaillés (les révolutionnaires, notamment). Difficile donc de s'attacher à notre trio, assez fade, alors que les situations sont quant à elles bien trouvées, dont notamment lors de la première partie consacrée à leur amitié. Malgré ces défauts, qui seront heureusement corrigés dans ses autres œuvres, la bande originale épaule le tout de façon enchanteresse, ce qui donnera plus facilement envie de le revoir pour en déceler toutes les strates.
Petit point tatillon, comme l'on en avait déjà parlé dans la critique de The voices of a distant star, l'équipe technique a visiblement un anglais toujours aussi médiocre, et l'on sourcillera en voyant un « Aproaching to Pararel world ».
Pour conclure, si l'idée de vous plonger dans un métrage qui sème continuellement des petits cailloux dans la mauvaise direction vous intéresse, vous aurez la production qu'il vous faudra, qui viendrait même rappeler la folie scénaristique de Richard Kelly et Southland Tales, avec une critique occultée de l'influence Américaine (il ne faut pas l'oublier, l'histoire n'est pas si fictive que cela, le Japon ayant été occupée par les Américains après la seconde guerre mondiale, et ce pendant pas loin d'une vingtaine d'années, ce qui aura divisé la population, entre sympathisants et conservateurs ayant gardé l'esprit Edo). Si ce genre de poussée extrême à la réflexion ne vous enchante guère dans les animes, il ne vous sera que très peu recommandé, surtout qu'il aura tendance à nécessiter plusieurs visions pour être pleinement compris.
Mention spéciale pour Atsushi Shirakawa (alias Tenmon) qui a composé une bande originale sublime, augmentant le potentiel de l'œuvre et soutenant cette ambiance maussade dont Shinkai semble devenu le maître absolu.
SlashersHouse
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le 21 janv. 2012

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