Réalisé par Mervyn Leroy, injustement oublié en France par la nouvelle vague et leur politique des auteurs, La Valse dans l'ombre est un mélodrame d'une beauté indéniable, au style épuré, où l'amour est plus important que tout.

Londres 1917, Myra (Vivien Leigh) tombe amoureuse de Roy (Robert Taylor), un officier, sur le pont de Waterloo Bridge pendant un raid aérien. Plus tard, l'armée annoncera qu'il est tombé sous le feu de l'ennemi. Le cœur brisé, Myra sombre dans la prostitution.

La Valse dans l'ombre fait partie de ces grands mélodrames de l'âge d'or Hollywoodien, produit par la MGM, alors au sommet de sa gloire. On retrouve ici les codes imposés par le studio, tel que celui de situer l'action dans l'aristocratie britannique en évitant à tout prix de montrer les classes les plus populaires, et un certain puritanisme engendré par le code Hays, en vigueur depuis 1934.

Le cinéaste ne s'attarde pas sur la condition infamante de Myra, ni même sur la guerre ou les autres éléments secondaires. Tout n'est qu'allusion et reste tapit dans le hors-champ. Mervyn Leroy va à l'essentiel, ne donnant à voir au spectateur que l'histoire d'amour vécue par deux âmes condamnées à se retrouver puis à être séparées. Ce parti pris apporte au film un caractère irréel, un peu comme si l'on était plongé dans les souvenirs du Roy de la première séquence, âgé d'une vingtaine d'années de plus, figé sur le Waterloo Bridge, se remémorant son amour perdu.

Car c'est aussi de perte dont parle La Valse de l'ombre. D'abord celle de l'être chère, impossible à retenir par la faute d'un destin capricieux qui refuse aux deux amoureux le bonheur tant souhaité. Arrive ensuite la perte de soi, la déchéance, subie par le personnage de Vivien Leigh, dont les ombres portées et le regard habité de l'actrice traduisent son conflit intérieur. Enfin vient la fuite du temps et de l'amour, incarnées par ce pont qui traverse les époques, nous faisant songer irrémédiablement à ces quelques vers d'Apollinaire : « Passent les jours et passent les semaines / Ni temps passé / Ni les amours reviennent » .
claudie_faucand
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le 21 mars 2012

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