Plusieurs critiques de ce film me poussent à en sortir une. Non pas que j'ai mieux à dire en terme d'analyse qu'un Sergent et autres honnêtes cinéphiles à l'esprit aiguisé, mais parce que je trouve qu'en évaluant le plus objectivement possible ce film on passe à côté d'une partie de sa valeur. Partie qui me semble en fait prépondérante ici : la vie aquatique, comme les autres films d'Anderson, est avant tout émotionnel, un appel à la réaction subjective.
Le film est bordélique, maladroit, inconstant etc. Mais je trouve que c'est précisément ces failles qui soutiennent le mieux ce qu'Anderson cherche à exprimer : la vie est bordélique, l'humain maladroit, sa valeur inconstante. C'est dans son habitude... Il appelle d'autant plus la réaction subjective car les personnages comme le réalisateur sont hautement construits par leurs visions personnelles, leurs subjectivités. Je comprend qu'on n'aime pas, il existe trop de subjectivités en ce monde pour que tout le monde s'y retrouve. Personnellement pour des raisons tout autant bordéliques la vision émotive d'Anderson colle à la mienne. J'ai grandi avec les aventures de la Calypso et des Cousteau, le choix graphique enfantin me séduit alors d'autant plus qu'il colle à ma propre vision enfantine. Et puis j'ai vécu bien des difficultés avec mon père, comme ma mère en a eu, la séparation parentale etc, aucune analyse psychologique ici, ça me parle simplement, immédiatement, profondément.
Pour moi un véritable succès cinématographique échappe à l'analyse, touche sans qu'on sache trop comment, renvoie à soi, aux autres. Quand c'est le cas les films deviennent des éléments de notre vécu constituant notre identité. Non pas qu'ils nous construisent (quoi que ça puisse arriver) mais surtout qu'ils révèlent ce que l'on porte en nous. Ressortant de la salle un peu groggy, incapable de sentir autre chose qu'une confusion positive, générant une difficulté à exprimer combien et comment on a été conquis. Ça c'est du cinéma.
Accessoirement j'aime les films de potes où l'on sent que le jeu est d'autant mieux porté qu'il est tout en connivence et cette bande là est juste somptueuse. Délicieusement sensible, hautement talentueuse.
9 parce bizarrement même si j'ai été happé chaque fois que j'ai vu ce film j'ai toujours beaucoup de mal à m'en souvenir. Peut-être parce que justement il est terriblement bordélique, touffu, parfois presque abstrait et que même si j'aime précisément qu'il me plonge dans cet état si particulier grâce à cette forme, j'aimerais bien m'en rappeler plus facilement.