Suite officieuse de "Forbidden Planet", "The Invisible Boy" fait plutôt office de spin off produit avant tout pour deux bien mauvaises raisons : surfer sur la popularité de Robby le robot, et surtout amortir le coût de sa fabrication (1 million de $ avec l'inflation) en le réutilisant dans un film à petit budget.


Qu'attendre de bon d'un film qui naît sous de tels auspices ? Pas grand chose évidemment. La MGM donne les commandes à un tâcheron maison sans ambition, à savoir Herman Hoffman. Pire, le studio ne cherche même pas à assumer la filiation avec "Forbidden Planet" autrement qu'avec la présence de Robby. Exit la conquête spatiale, ce spin off nous ramène en effet dans les années 50, aux balbutiements de l'informatique et de l'aérospatiale.


Et autant dire que c'est le serrage de ceinture à tous les niveaux. On peut excuser l'absence de vedettes, les décors assez cheap et la réalisation fauchée que trahissent des incrustations bien maladroites. Mais s'il y a une chose que l'argent ne peut acheter, c'est bien l'imagination, et "The Invisible Boy" en manque pourtant cruellement.


La première partie est typique des comédies de gosses dont "on" raffolait à l'époque, avec un gamin insupportable qui s'amuse à faire les conneries dont rêvent tous les sales mioches. De peur qu'il devienne une racaille qui regarde la télé, mâche des chewing-gum et va au cinéma (sic), son père l'éduque à la dure, en lui infligeant exercices de maths, leçons de vie à l'eau-de-rose et séances d'hypnose face à un superordinateur. Patatras, voilà-t-y pas que le chiard devient un surdoué capable d'humilier son père aux échecs et de réparer un robot sur lequel les pontes de la NASA se sont cassé les dents. Par le plus grand des bonheurs, le robot en question, qui n'est autre que ce diable de Robby (arrivé du futur dans une soucoupe volante, mais ça a pas l'air de choquer grand monde) va rendre notre inconvenant moutard totalement invisible. Le rendre muet eût valu un point de plus dans ma note finale, mais le scénariste ne voulait décidément pas que je prenne de plaisir devant le film.


Dans la deuxième partie, on délaisse la comédie pour une intrigue vaguement SF où le superordinateur du père complote contre l'humanité pour prendre le pouvoir. Il est assisté dans sa tâche par le docile Robby, qui malgré sa démarche de crabe en pleine crise d'hémorroïdes, ses bras de T-Rex et sa furtivité proche du néant, va réussir à berner une dizaine de militaires visiblement pas bien réveillés pour prendre le contrôle de leur esprit.


Tout ça vous a l'air confus ? C'est normal, vu que "The Invisible Boy" ne s'embarrasse pas trop avec la logique (trop cher, sans doute) ni avec les aberrations. Ainsi apprendra-t-on avec un brin de circonspection que quand votre gosse devient invisible, la bonne chose à faire est d'aller se coucher, puis d'aller bosser tranquillou comme si de rien n'était. Ca finira par passer, on lui donnera un antibiotique.


Peut-être vous demandez-vous s'il n'y a tout de même pas, au fond, un petit facteur "nanar SF 50's" qui confèrerait un charme certain au film. Eh bien, j'aurais aimé, mais non, "The Invisible Boy" se montre bien trop ennuyeux, plat et mal foutu pour qu'on puisse s'en délecter, même au huitième degré. Herman Hoffman filme tout ça comme s'il était en train de mettre en boîte une sitcom banale ou une pub pour un lave-linge. Pas d'inspiration visuelle, pas de rythme, rien qui dépasse, nada.


Au bout du compte, même Robby échoue à soulever l'enthousiasme, se révélant au contraire plutôt antipathique voire agaçant. Autant dire qu'on est à des années-lumière du magnétisme et de la poésie SF de "Forbidden Planet". Jusque dans le fabuleux Technicolor qui devient ici un noir et blanc désespérément quelconque.

magyalmar
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le 16 sept. 2017

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magyalmar

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