« Une année, un film » : Le Chanteur de Jazz, Alan Crosland, 1927.

Si vous avez eu l’occasion de vous intéresser à l’histoire du cinéma, nul doute que vous vous êtes un jour demandé quand les paroles ont finalement joint les images, lors d’une époque étrange où le cinéma muet était à son apogée, et où la volonté d’innover et d’évoluer a développé les moyens nécessaires à l’arrivée du cinéma parlant. La date généralement retenue est 1927, avec l’arrivée du film « Le Chanteur de Jazz », réputé pour être le premier « talkie » (terme anglais définissant les films parlants, NDLR) de l’histoire du cinéma. Pour faire dans la dentelle, c’est faux. En effet, les procédés de synchronisation entre l’image et le son faisaient déjà débat depuis quelques années afin de tenter l’expérience en « live » dans les cinémas, mais divers échecs ont refroidi les gérants des établissements, repoussant sans cesse ce moment tant attendu où les voix s’exclameraient enfin sur les écrans. Le Chanteur de Jazz n’est pas un film parlant à proprement parler (quelle tournure saugrenue), mais chantant. La nuance réside dans le simple fait que seules les scènes chantées proposent d’entendre la voix d’Al Jolson, en plus de brefs dialogues, mais la grande majorité des scènes restent vierges de paroles. Toutefois, ce film représente un vrai progrès dans le monde du cinéma, je vais y revenir un peu plus tard.

L’histoire du Chanteur de Jazz se déroule au sein d’une famille juive, dont le père est chantre dans une synagogue, un héritage dont il vente la pérennité, une tradition vieille de cinq générations déjà. Malheureusement pour lui, Jakie, auquel il a appris tous les chants sacrés, n’ambitionne pas d’embrasser la même carrière. Jakie est un enfant des années 20, la société évolue, et la musique avec elle. Le jazz devient de plus en plus populaire, et Jakie veut devenir un chanteur de jazz. Son père va un jour le surprendre en pleine représentation dans un bar, et le petit Jakie va s’enfuir de la maison pour réaliser ses rêves sans être sous l’emprise de son père.

Pour revenir au début de cet article, le premier élément marquant de ce film concerne la synchronisation entre le son et l’image enfin réussie avec succès, et des scènes de chant qui ponctuent tout le film. Ensuite, c’est aussi l’un des premier grands succès de la jeune Warner Bros., qui vit alors une période compliquée sur le plan financier, et également à cause de la mort de l’un de ses fondateurs. Bien que considérer Le Chanteur de Jazz comme un film parlant soit une erreur, il marque sans aucun doute le passage de l’ère du cinéma muet à celle du cinéma parlant. On constate également une narration très caractéristique des films américains, relativement cliché et convenue mais agréable, toujours d’actualité presque 90 ans après. Il serait également impardonnable de clore cet article sans accorder une mention spéciale à Al Jolson, l’un des plus grands artistes de music-hall américains de la première moitié du XXe siècle, enjoué, plein de candeur, qui nous transmet toute son énergie à travers ses chansons.

Le Chanteur de Jazz est un joli film, qui s’est réservé une place de choix dans l’histoire du cinéma. En somme, c’est le parfait hybride qui combine les avantages du cinéma muet et ceux du cinéma parlant.

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le 18 déc. 2014

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