Les hommes et les lieux

Lorsque Claire Simon arrive dans un lieu, elle ne filme pas immédiatement, elle s'installe et attend que le lieu vive avec elle. Puis elle allume sa caméra et laisse le monde vivre devant elle. Elle s'installe dans des espaces dans lesquels elle se fond, desquels elle semble se sentir proche, des lieux qui accueillent des hommes mais aussi du vide, quelque chose d'intangible. C'est ce que le cinéma de Claire Simon montre. Le regard vers le ciel d'un jeune homme dans la grandeur d'un amphithéâtre, celui d'une jeune femme dont l'angoisse se dirige vers la foule, une succession de paroles qui créent le rire.
Ce qu'elle parvient à montrer, c'est ce qui naît de l'interaction entre les hommes, entre les hommes et les choses et surtout les lieux et en quoi ils façonnent les situations. Claire Simon réhabilite les lieux et ce qu'ils ont d'organique, des lieux jamais seulement des endroits de passage. Les lieux se réveillent avec elle, prennent vie à mesure que les hommes les peuplent.

Pour laisser les choses s'installer, Simon n'insère aucune voix-off, usant seulement du montage et des mouvements qu'elle donne à la caméra pour faire parler les moments, les mettre en rapport, les faire dialoguer et dire des choses, faire rire, sourire.

Le lieu, dans lequel s'installe Claire Simon, c'est la Fémis, l'école de cinéma nord parisienne dont l'entrée fait rêver chaque année plus de mille candidats. Les hommes qui habitent ce film, ce sont ceux qui veulent peupler la Fémis, y apprendre et créer, ceux qui passent Le concours annuel de l'école. Tenus par la main de Claire Simon, on les suit des premières épreuves écrites aux oraux d'admission.

L'acuité Simon c'est de parvenir à raconter une histoire, à dire des choses des hommes à l'aide d'un montage, de mouvements de caméras sur lequel le son des choses ou des hommes qu'elle filme attire l'attention du spectateur sur des détails. Cette acuité permet à Claire Simon de faire parler la bienveillance et la critique avec laquelle elle regarde les choses et les situations. Comme dans son dernier long, Le bois dont les rêves sont faits, Claire Simon laisse s'échapper les rêves des hommes, cherchant à en faire quelque chose. Ici, on parle d'histoires de cinéma et de la manière dont les hommes vivent avec lui.