En lisant la critique de Marco Sennario je rejoins son argument principal du "à quoi tient une sélection à cette grande école ?" . Mais je le dédouanerais de la seule FEMIS (à prendre ici comme prétexte illustrateur) en développant le vrai message du film.


Claire Simon sur ses dernières réalisations, documentaire ("Les bois dont les rêves sont faits") ou de fiction ("Gare du Nord") opte pour une option filmique de prendre un lieu ouvert, gare, bois et là une école, d'y poser une espèce de cloche de verre et de filmer tout le petit monde qui s'y trouve et évolue sur une séquence temps donnée. Il y a donc des personnages principaux de fiction mais bien réels et une kyrielle d'autres qui sur un plan secondaire donnent quitus au fait que nous sommes bien dans la vraie vie et auxquels Claire Simon accorde une importance non négligeable.


"Tous égaux, mais seuls les meilleurs..." est la base line de l'affiche, une ambivalence qui sous entend deux interprétations possibles. Soit l'on se dit "super un doc sur cette fameuse école dont tout cinéphile à rêvé à un moment ou un autre". Plus perspicace, est celui qui pense "Etrange pourquoi ces points de suspension, c'est un peu comme si on s'arrête en plein milieu d'un phrase pour réfléchir à la suite". Et Claire Simon de donner à réfléchir au sens large !


Bien sur les quelques postulants sur lesquels le film s'attarde, représentent une palette exhaustive des candidats (le fou créateur, le passionné, le rationnel, la hâbleur , le bosseur, le rêveur...), palette ou panel ? La nuance est importante sur le sens de ce documentaire. Les professionnels de la profession, choisis comme membres du jury de l'Olympe sont tout aussi éclectiques dans la composition.


Une condensation d'émotions contrastées couvre peu à peu les parois de notre cloche de verre. Claire Simon sait saisir l'instant de l'intimité et offre un montage, pourtant basique, magnifiquement orchestré entre tension et espoir.


La forme est donc calculée, précise et se tient, malgré quelques développement de scènes parfois stériles. Pourtant, c'est le discours qui prend le dessus sur l'image. A commencer par des chuchotis, le fameux rêve d'une promotion paritaire (au niveau du sexe, des "origines", du rang social). Paroles qui font sourire par leur naïveté et dont la portée se décuple au moment du grand oral où s'expriment alors des jugements de valeurs parfois hallucinants (ceux rapportés par Marco Sennario). L'impartialité (le candidat est-il fait pour les métiers du cinéma ?) faisant place à la superficialité. Voire, à la raison conformiste qui veut qu'un candidat soit jugé hors norme ("celui-là s'il est retenu, je me barre") ou hors classe ("il faut le prendre, c'est un bouseux", sous-entendu un pauvre).


Et le comportement sociétal en général (je le disais en avant propos la FEMIS n'est qu'un prétexte) de se voir épingler, frappé d'un mal pandémique : le paraître du politiquement correct. Une promotion ne pouvant se contenter de personnalités plurielles dans l'apport créatif, mais aussi plurielle dans sa composition sociale gérée par des quotas intellectuels (autant de... et de... mais aussi pas mal de...). Le talent devenant alors secondaire au regard de qui représentera le candidat dans la communauté, un formatage, qui à l'image de notre société actuelle, représente une vertu, mais surtout un échec probant et un danger à terme de discréditer l'Establishment.


Bien évidemment, la vision de Claire Simon est subjective, la Femis forme chaque année des étudiants qui parviendront à leur rêve et viendront caresser ceux des spectateurs. Ce n'est d'ailleurs pas le propos de la réalisatrice que de remettre cela en question, toutefois elle éveille nos sens sur l'autrement, et donc l'espoir d'y arriver malgré tout, dont l'illustration la plus probante revient à l'un des membres du jury : "celui-là n'a pas besoin de nous pour réussir". Dont acte !

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le 14 févr. 2017

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Fritz Langueur

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