Vous Avez Dit ‘Meurtre’ ?

Hercule Poirot prend l’Orient-Express pour rentrer à Londres mais se retrouve coincé sous la neige. Il peut par contre tuer le temps en essayant de trouver l’assassin de son voisin, le mystérieux Ratchett, mort durant la nuit.

En cette année assez sinistre, c’est un plaisir de redécouvrir certains talents comme Lauren Bacall, Ingrid Bergman, ou encore Anthony Perkins ou le récemment décédé Sean Connery, dans un univers, un style inconnu. Pour les femmes, c’est l’occasion de les voir plus âgées que quarante ans -Bacall et Bergman ont évolué à une époque où on ne se souvient d’elles que « jeunes », ce que j’ai toujours trouvé dommage. Pour les hommes, notamment Perkins, c’est l’occasion de les voir dans des rôles radicalement différents. Bon… peut-être pas le rôle de Connery. Connery joue facilement la même chose aussi… je veux dire, il jouait très bien les écossais mal léchés avec qui il ne fallait pas se frotter ! Peut-être un peu trop bien… un peu trop souvent aussi…
Par contre, c’est un plaisir de découvrir un autre film de Sydney Lumet. J’avais adoré son Douze Hommes en Colère ! Le hic est qu’il devait me sembler tellement génial que j’ai été un peu gênée avec celui-là. Le ton de la mise en scène est très dérangeant : très long, avec une mauvaise introduction qui ne donne pas du tout envie de continuer, le film finit par prendre au milieu, avant de redevenir ultra-long et un peu ennuyeux à la fin. De plus la caméra filme de manière très académique et on sent en permanence que Lumet coince sa caméra entre deux battants, faute de mieux. Et puis, de temps en temps, il nous prouve au contraire qu’il peut être dynamique, ingénieux et la déplacer où il veut. C’est très particulier et, en soit, je comprend mieux ce que Branagh a voulu apporter avec le suivant : plus d’énergie, de panache, d’action. Trop d’action ! Entre celui-là qui est trop mou et l’autre qui est trop énergique, est-ce qu’on peut espérer que la prochaine adaptation saura être un juste milieu ?
Le montage fait aussi des fondus dégueulasses pour nous montrer des flash-backs… particulièrement mous et étranges. Bon, au moins, ils ne sont pas utilisés pour servir d’hypothèses foireuses et hautement improbables à l’enquête.
Alfred Finney a aussi été une déception : sa performance en Hercule Poirot est risible pour ne pas dire insipide. L’homme ne parle pas français, ne fait pas un accent français correct -merde, quoi ! A côté de Jean-Pierre Cassel, parle clairement comme un anglais -dans le sens où il débite certaines lignes de dialogues avec l’aisance d’un acteur de théâtre britannique, a des moustaches ridicules et clairement un faux ventre pour lui rajouter quinze kilos en plus. Et puis, c’est quoi cette démarche ! Il fait plus flipper à la fin qu’autre chose !
Du reste, la reconstruction historique n’est peut-être pas la plus parfaite. Elle fait son boulot mais sans plus.
Par contre, là où le film apporte une vraie force, c’est au moment de présenter l’enquête. Certes, elle commet encore quelques cafouillages par-ci, par-là -ce qui me donne une petite idée d’où la version de Branagh tient certaines de ses « erreurs »- mais dans l’ensemble, ça fait plaisir de voir une reconstitution fidèle du crime de l’Orient-Express. Après avoir vu beaucoup d’adaptations des œuvres d’Agatha Christie, j’avais fini par me demander si la Reine du Crime était d’un tel génie que son œuvre était impossible à adapter. Mais à côté, j’avais la série Hercule Poirot qui prouvait clairement que c’est parfaitement possible.
Ce film me l’a confirmé et ce, malgré deux ou trois gros plans sur les acteurs, hautement horripilants car trop suspects pour passer auprès d’un non-initié du roman. Surtout parce que, comme je l’ai dit, le film est vraiment bon au milieu, on y entre pleinement. C’est juste dommage qu’on est une introduction trop longue et qui spoile trop comme l’introduction le fait (en plus, bonjour la modification du roman où, non pas une personne, mais la moitié de la maisonnée a assisté à l’enlèvement sans rien faire). Ou que la conclusion soit aussi… chiante.