Que ‘Le Cuirassé Potemkine’ soit un film de propagande populaire russe ne gâche pas vraiment le visionnage, dans la manière où la propagande est tout à fait assumée et explicite. En revanche, le spectateur sera plus sensible aux défauts narratifs du récit et au manque de rythme de l’œuvre.
En effet, le réalisateur Sergei Mikhailovich Eisenstein a beau dynamiser son récit à l’aide d’un montage dynamique et de très courts plans, le film échoue par moment à créer une véritable tension chez le spectateur. Typiquement, la scène où le commandant ordonne l’exécution des mutins, avec sa mise en scène dramatique, entraîne plus d’impatience que de suspense. La faute d’une part au muet, qui alourdit évidemment le récit, mais également à des mauvais choix narratifs. Difficile de se sentir concerné par l’injustice qui frappe les marins quand ceux-ci nous ont été présentés aussi sommairement deux scènes avant leurs exécutions.
D’ailleurs, un sentiment d’urgence règne sur l’ensemble du récit, qui peine du coup à embarquer sérieusement le spectateur. Entre le déroulement expéditif du récit et le capharnaüm pas très lisible des scènes d’actions, le réalisateur manque souvent de clarté. Et lorsque le rythme du récit se calme, c’est pour des séquences qui provoque en général un ennui poli.
Au moins, ‘Le Cuirassé Potemkine’ a l’intérêt de proposer une mise en scène pas forcément désagréable. Au-delà du passage culte dans les escaliers d’Odessa, on appréciera notamment les superbes plans portuaires dans la brume ou les séquences de rassemblement populaires assez impressionnantes. En outre, la bande-originale est plutôt efficace (surtout sur la montée de tension finale), même si elle s’essouffle immanquablement par moment.
Un film muet à la narration rebutante.