Il n'y a bien qu'Akira Kurosawa pour me surprendre dès la première minute de son film. Le plan d'ouverture, montrant Toshirō Mifune de dos, est accompagné d'une musique dramatique, qui après quelques notes se mue en une sorte de ronde, à la fois pataude et entraînante. Le ton est donné : Yojimbo sera sérieux, mais pas trop quand même.
L'histoire de ce village divisé en deux clans distincts est donc traitée avec une certaine gravité (surtout dans la dernière partie du film) mais elle est également ponctuée par de petits moments légers vraiment bienvenus. Le film se moque ouvertement des personnages en accentuant leurs défauts (l'avarice, la lâcheté mais aussi la laideur), ce qui est particulièrement utile pour rendre des situations absurdes. Je prends comme exemple le moment où deux adversaires se disputent comme des gamins l'allégeance du samouraï, qui est complètement ahurissant. L'ensemble est vraiment décontracté, à l'image du personnage principal.
En effet, le samouraï errant fait preuve de beaucoup de nonchalance, tout en s'autorisant quelques pointes de sarcasme de temps en temps. Il sait qu'il est en position de force et mène les dirigeants par le bout du nez à des fins personnelles, tout en aidant les personnes souffrant de la situation politique du village. Il s'agit vraiment d'un rôle à la gloire Toshirō Mifune (ce qui n'est pas pour me déplaire) et ce dernier se l'approprie brillamment, sans surprise.
Tout comme Les Sept Samouraïs, Yojimbo se construit sur l’attente d'une confrontation qui arrivera fatalement. Mais là où le film de 1954 en faisait un drame poignant, celui de 1961 en fait un film d'action baignant dans un humour délicieux. Par ailleurs, le long-métrage évoque beaucoup le western, rien d'étonnant au fait que Sergio Leone en reprit les grandes lignes dans son fameux Pour une poignée de dollars.