Première réalisation en solo derrière la caméra, Gilles Lellouche réunit toute la belle famille du cinéma français pour réaliser une comédie sans moquerie, sensible et drôle qui aborde le thème de la dépression. Ayant fait sensation à Cannes hors-compétition, "Le Grand Bain" s'est vu salué par la critique et est défini comme "la meilleure comédie française de l'année".
Arrivé à un point de stagnation et de flou total dans sa vie, Bertrand se lance instinctivement un drôle de défi ; celui de découvrir le monde inconnu et rare de la natation synchronisée masculine. Mais il ne pensait pas que cette discipline rassemblerait d'autres personnes aux problèmes existentiels tout aussi pesant que sa dépression...
Après une ouverture pseudo-philosophique à la façon film d'auteur, on se plonge dans ce "Grand bain" avec une certaine confiance, surtout lorsque l'on voit le casting cinq étoiles. La bande de pieds nickelés constituée de Poelvoorde (le plus dissipé), Canet (le plus chiant), Amalric (le plus dépressif), Katerine (le plus décalé) et Anglade (le plus touchant) est entourée de figures féminines à poigne (Efira, Bekhti et Foïs) ! Ceux qui parlent encore de sexe faible ont ici toute l'antithèse de leur propos. Beaucoup étonnent avec leur rôle à contre-emploi comme Bekhti et Canet tandis que les autres prouvent une fois encore la force poignante de leur jeu (Efira, Anglade, Foïs). Pleine de bons sentiments, cette reconquête vers l'estime de soi est sublimée en permanence par son décalage, son humour et son dynamisme. Ce qui marche aussi et surtout, c'est son ton bienveillant et absolument pas fataliste ou moqueur, et ça, ça fait toute la différence avec la mode actuelle des comédies populaires lourdes et bêtes. En cela, le film se distingue et séduit. La discipline de la natation synchronisée donne toute l'originalité à cette histoire et offre des plans aquatiques superbes, dépaysant. Le lieu central de la piscine offre une échappatoire, un champ de possible qui va permettre à ces personnages pommés d'apprendre à se connaitre tout en découvrant les autres. La comédie poilante, du coup, s'efface pour laisser place à une chronique sociale alternant larmes et sourires. Le message est beau et réveille tout en donnant espoir : il faut vivre le moment présent car il n'est jamais trop tard pour se réinventer et se redécouvrir.
Mais, à l'instar des "Petits Mouchoirs" de Guillaume Canet, cette comédie chorale parle avant tout d'une génération. C'est à la fois sa force car il réunit bon nombre de critiques dithyrambiques. Mais c'est aussi son défaut, car personnellement, je ne me suis pas senti concerné par cette tranche de vie de quadragénaires dépressifs aux problèmes existentiels. Certes, certains passages sont touchants mais pas au point de s'y reconnaitre, de s'identifier ne serait-ce que momentanément. Même la bande originale, branchée années 80, n'a fait que m'éloigner encore plus du sujet. J'ai trouvé cette quête vers le bonheur belle et bien mis en scène mais je me suis senti à côté de la plaque, pas du tout concerné par ce que je voyais. Peut-être et surement reviendrais-je sur mon point de vue dans quelques années, mais là, "Le Grand Bain" décrit le monde des adultes individualiste et pourri qui retrouve la force du collectif de la manière la plus décalée qui soit. Je reconnais que le scénario est admirablement bien écrit, que les acteurs sont pleinement dans leur rôle mais quand ça ne vient pas nous happer intimement, l'ennui est inévitable... Qu'on soit clair, je préfère amplement le succès du Grand Bain au bain de bouche d'"Alad'2".