S'il y a bien un scénariste qui ne déçoit jamais vraiment, c'est bien Aaron Sorkin. L'auteur de Social Network aborde avec Le Grand Jeu l'univers du poker, comme il avait abordé le base-ball avec Moneyball : plutôt que de simplifier le vocabulaire pour être grand public, il préfère mitrailler l'audience de termes abscons et vous laisser sur le carreau. Parce que ses personnages n'ont pas à être moins pros pour vous plaire.
Il y a des tonnes de moments d'écriture jouissifs dans ce portrait d'une "overachiever" typique de son univers. Le destin de Molly Bloom est unique en son genre, mais même si le script de Sorkin retombe joliment sur ses pieds, il n'a finalement rien d'exemplaire. Bloom est une battante brillante, une femme à poigne dans un monde d'hommes - et qui mieux pour incarner ce genre de personnage que Jessica Chastain ? -, mais c'est aussi une opportuniste, un brin pédante, parfois insupportable. Personne n'est parfaite, me direz-vous.
La plus grande tare du Grand Jeu est sans doute d'avoir Sorkin comme réalisateur. Entre d'autres mains, le film aurait pu dépasser son sujet un peu plan-plan, se reposer moins sur sa voix off et plus sur ses images, mettre mieux en valeur ses perfs d'acteur, et mieux gérer son rythme, en évitant de mécaniques allers-retours temporels. Jessica tient en tout cas sacrément bien la baraque. On est plus surpris, à ce niveau.