Nous savons aujourd’hui beaucoup de choses sur la Shoah. Au point de rebuter parfois avec un autre film sur la guerre, un ouvrage de plus sur Auschwitz. Ce que le réalisateur Giulio Ricciarelli propose avec Le Labyrinthe du silence est une mise en perspective grâce à un retour dans le temps de quelques années : l’Allemagne de l’Ouest en 1958. Que savait-on de la Shoah ?
Tout commence par des images d’une luminosité étonnante : tout est clair, propre, les enfants jouent, les gens sourient, s’amusent. Tout va bien. Ces images de cartes postales reviendront à chaque extérieur : elles sont le reflet de ce que le pays veut renvoyer. Tout va bien, la guerre est finie, n’en parlons plus.
Le jeune procureur Johann Radmann s’ennuie. Son père qu’il vénère, mort sur le front russe, lui a enseigné la rectitude et l’amour de la vérité. Aussi, quand surgit le journaliste Thomas Gnielka (André Szymanski) est-il le seul à l’écouter. C’est que Gnielka parle d’injustice, d’oubli, de crime même. « Connaissez-vous Auschwitz ? » demande-t-il à la ronde aux employés du Palais de Justice. Mais à Franckfort en 1958, personne ne connait Auschwitz. Pour Johann Radmann et beaucoup d’autres jeunes gens, c’était un camp de détention préventive.
Il va donc avoir beaucoup de travail le jeune procureur qui va aller de découverte en découverte. Son premier rapport concerne un ancien SS professeur depuis 1947 alors qu’il n’a pas le droit d’enseigner. Johann Radmann enquête, remet un rapport à la suite duquel on lui affirme que l’ancien nazi a été suspendu. Or, il n’en est rien. Dès lors, la plupart de ses collègues font preuve d’hostilité à son égard. « Les vainqueurs refont l’Histoire » lui dit-on, au détriment des vaincus. Même au consulat américain on essaie de le dissuader : "Hitler is gone" , le nouvel ennemi est soviétique. On lui dit que les nazis ont déjà été jugés à Nuremberg, qu’il faut tourner la page. Mais ce qu’il veut lui, c’est montrer ce qu’on fait les Allemands ordinaires, pas juste Hitler ou Himmler. Ce qu’il veut oui, c’est que chaque Allemand se demande si son père n’était pas un assassin.
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