Il y a des films qui vieillissent admirablement bien.
Il y a des films à côté desquels on est passé par manque d'intérêt, et qui pourtant font mouche et nous convainquent dès le premier visionnage.
Il y a des films d'action qui peuvent être réussis même en étant tournés en langue française.
Il y a des films dont l'originalité ne laisse pas indifférent quoi qu'on en pense.
Il y a des films atypiques, que l'on ne peut ranger ailleurs que dans la case "film culte".
Il y a des films que l'on a envie de revoir et qu'on se plaît d'apprécier malgré les mauvaises langues et la pub négative qui tourne autour.
Et il y a des réalisateurs qui réussissent le pari insensé de réunir tout ça à la fois.
Ce que j'apprécie avant toute chose dans un film comme Le Pacte des Loups, c'est sa singularité. Celle-ci pourrait se valoir de par un mélange de genres plutôt audacieux et varié (du thriller au film d'époque, en passant par le film d'arts martiaux asiatique ou même le western) ou encore l'exploit de réunir à l'affiche autant de visages les plus connus du cinéma français (Vincent Cassel en tête). Mais il n'en est rien; ce qui constitue la pièce maîtresse de ce film se résume à un simple mot: réalisation. Elle-même réunissant de nombreux sous-arguments de taille, parmi lesquels j'ai nommé: mise en scène remarquable, décors somptueux, ambiance immersive, scènes d'actions (très) réussies, image à couper le souffle, montage surprenant d'intensité et de dynamisme...
Durant 2h20 où l'on ne s'ennuie pas une seconde, Christophe Gans nous plonge intégralement dans son univers, celui d'un gosse excité en quête d'aventure et de découverte. De tous les composants du film, seule l'histoire (la traque de la Bête du Gévaudan) s'inspire de faits réels; le reste n'est qu'écriture et illusion. Les personnages sont inventés de toutes pièces, les costumes exagérés, les différents mœurs et autres contextes d'époque à la limite du caricatural et les scènes de castagne (au centre desquelles s'illustre toujours un Marc Dacascos en grande forme) clairement anachroniques. Et pourtant, la sauce prend dès les premières minutes. Pourquoi ? Parce que c'est justement le sens dans lequel le film se doit d'être visionné: un roman graphique charmeur et surprenant doublé d'une bonne dose d'action brutale et déjantée; un 300 à la Française en quelque sorte, sans hoplites spartiates. Le résultat est très prenant et assumé jusqu'au bout.
Que demander de plus?
Certes, l'on regrettera quelques petits défauts de fabrication (la toute première scène totalement risible, la petite romance d'arrière-plan-qui-ne-rime-à-rien, le personnage WTF de la gitane possédée...), heureusement rattrapés par des passages d'anthologie (l'arrivée des deux protagonistes en Gévaudan, la "capture" spectaculaire de la bête ou encore le combat final). Par ailleurs, certains détails ne manqueront pas de marquer tout le monde quoi qu'on en pense au demeurant. Pour ma part ça a été dans la note suivante:
- "Le Bihan qui se la joue Assassin's Creed ? La classe!"
- "Bellucci en diseuse de bonne aventure ténébreuse et sexy ? What else!"
- "Cassel qui se bat avec une épée à la SoulCalibur ?? Trop cool!!"
En définitive, Le Pacte des Loups est plus qu'un simple divertissement sans être un blockbuster: c'est à mon sens une belle définition du mot cinéma. Gans ne se contente pas de nous en mettre plein la vue, il parvient à mettre en scène une vision surnaturelle, voire fantasmagorique d'une anecdote historique de second-ordre et à la rendre vraiment agréable au visionnage. Il réussit là où d'autres se casseront les dents bien des années plus tard (je pense notamment à Paul W.S. Anderson et son immonde Les Trois Mousquetaires 3D) et nous fait une belle démonstration de son talent, ce dont peu de réalisateurs Français peuvent se vanter à l'heure actuelle. Encore moins lorsqu'il s'agit de film d'action.
Reste à prier maintenant pour que, si une adaptation de la série BD Le Scorpion de Marini et Desberg est prévue un jour, ce soit quelqu'un comme Gans qui la réalise.