Plein de bonnes intentions, le film est certes virtuose, intelligent et d’une qualité d’image remarquable, mais très classique, au point d’en être parfois trop académique (pour plaire à l’Académie ?). Captivant mais sans surprise, dense mais ludique, il se retrouve rapidement confronté à la tentation de l’ethnocentrisme inhérent à de nombreuses productions américaines, qui nous parait toujours légèrement indigeste. Le Pont des Espions n’échappe pas au manichéisme, ni au patriotisme exacerbé : prisonniers russes mieux traités dans les prisons américaines que le contraire, usage ou non de la torture... Il est bien dommage que Spielberg n’ait pas échappé à la publicité moraliste des grandes valeurs "américaines" telles que la liberté et la justice, que d’autres pays que le sien ne partageraient pas.
Le Pont des Espions se distingue par une histoire puissante, un sens de l’esthétisme à toute épreuve mais surtout par les grands principes qu’il évoque et par le débat qu’il entraine. Faut-il avoir peur ? Et si oui, de qui et de quoi ? Est-il nécessaire de s’engager ?
Edmund Burke disait : "Pour triompher, le mal n’a besoin que de l’inaction des gens de bien". C’est le grand message de ce film : James B.Donovan s’est engagé, a agi selon sa conscience et s’est impliqué corps et âme dans son combat pour la paix. Son parcours pourrait bien devenir une source d’inspiration, dans les grandes épreuves que traversent nos sociétés contemporaines. A méditer ; si le cinéma peut encore changer le monde.
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