Le Prestige par Mickaël Barbato
Grand, très grand film.
Comme tout grand film, il se construit en trois thématiques. Ici : la compétition, la marche inarrêtable du progrès (thème inconscient qu'il devrait développer) et le dernier, l'implicite ici mais qui permet de dire à Nolan "MERCI", sa vision du Cinéma. Le Prestige a cela d'intelligent qu'il combine efficacement pur divertissement, par le biais de séquences de spectacles tout bonnement incroyables, à une réflexion limpide sur son art. Une réflexion qu'on ne peut que suivre, et qui met d'ailleurs le montage au premier plan, comme moyen de mystification, puis de prestige. Le montage est l'arme du cinéaste, il est ce qui lui permet de jouer avec les émotions, d'emmener à un point puis de le tirer vers son exact contraire avant de le ramener à l'état initial.
C'est peut-être là que le film rate le coche de la perfection. Nolan donne une vision parfaite, de vrai passionné, comme rarement vu au cinéma. A côté de lui, le père Tarantino peut se rhabiller. Seulement, Lee Smith ne réussit toujours pas à rendre une copie complètement propre, quelques plans ne durent pas assez, on les sent coupés à la va-vite, volonté de rapidité parfois contre-productive. Comme la séquence dans la ruelle, quand le "technicien" est enlevé par Angier. On adhère comme des gosses à la leçon de cinéma, mais cette dernière n'est pas totalement réussie à l'écran. Attention, c'est du haut niveau quand même et rien n'est gênant, d'ailleurs ça reste un avis subjectif comme souvent avec cette notion, mais le film aurait peut-être gagné avec un autre monteur... Quand à la narration éclatée, elle est parfaite.
Au-delà de ce troisième thème, comment ne pas être retourné au final ? On pourra toujours regretter un twist assez prévisible, depuis la séquence du dîner en restaurant avec Sarah Borden où le jeu est beaucoup trop extrême, on sent la petite pichenette à l'oreille et ça ne manque pas. Dommage, mais la vraie beauté du film n'est pas dans son twist. Le Prestige n'est pas un film à twist, il est un tour de magie qui respecte à la lettre la recette donnée tout au début du film : un pacte est passé avec le spectateur, on nous donne tout, froidement, et il est impossible de comprendre. Puis on a l'effet, où le scénario s'emballe, devient extraordinaire, dans les deux sens ici. Pour finir, on a le prestige, dans un final d'une force phénoménale. On a là tout ce qu'on veut voir au cinéma.
Le Prestige est un film qui devient instantanément chef-d'oeuvre, parmi les oeuvres les plus fortes du cinéma actuel. La plus forte ?