• Cass, Egan, et toi, prenez vite l'or de la diligence. Capitaine, on est des Confédérés. En mission pour l'armée de la Virginie du nord.

  • Vous devriez me garder en vie. Vous allez avoir besoin de moi.

  • Ah oui ? Pourquoi ? Qu'est-ce qu'il...

  • Tenez. Que vouliez-vous nous dire ?

  • La guerre est finie. Vous vous êtes fait battre à plate couture.

  • Tu mens. Lee n'abandonnera jamais.

  • Il y a plus d'un mois. Lee a capitulé... Vous feriez mieux de me garder en vie.

  • Il mentait. Il voulait nous retenir. Il mentait, c'est tout.

  • Peut-être.



Pour une première et dernière réalisation, le scénariste Roy Huggins s'en sort avec les honneurs en réalisant avec Le relais de l'or maudit un western techniquement somptueux (difficile de croire qu'il s'agit d'un novice) qui commence très fort pour finir très fort avec un petit ventre mou durant quelques parties du récit contrebalancé par des péripéties de haute volée alliée à des moments dramatiques psychologiquement caractérisés par une atmosphère ambiguë. Roy Huggins gère admirablement bien son récit, décortiquant les relations avec une grande fluidité et un flair, suscitant des moments d'inspiration authentique autour d'un groupe de personnages qui symbolisent chacun à sa manière un idéal de ce pays et réussissant par là même à capturer un humanisme qui transcende tout l'ensemble du récit, ne tombant ainsi jamais dans la caricature grâce à l'ambivalence des points de vue de chaque protagoniste qui ne sont pas schématisés. Le concept initial est intéressant dans les prémisses qu'il véhicule malgré quelques maladresses (une histoire d'amour forcé entre Randolph Scott et Donna Reed qui n'avait pas lieu d'être) qui ne gâche pas l'expérience de par les nombreuses qualités, sachant qu'on perçoit derrière ce film un véritable investissement, une envie d'aller plus loin que l'idée de base, même s'il ne va pas au bout de ses possibilités.


Randolph Scott fait preuve de personnalité autant sur son physique que son mental dans le rôle de Matt Stewart, major Confédéré à la tête d'une petite unité chargé d'attaquer un convoi d'or transporté par les tuniques bleues. Le Major Stewart accompagné de ses hommes vont commettre involontairement l'irréparable en abatant les nordistes alors que la Guerre de Sécession est terminé (chose qu'ils ignoraient) se retrouvant rétrogradé de soldat confédéré à criminel pourchassé, ne laissant comme autre seule solution que de fuir avec le butin. L'interprétation de Scott est impeccable, il amène une force tranquille efficacement accompagnée d'humanisme et de volonté par le biais d'un comportement oscillant entre le noir et le blanc. La présence de Randolph Scott est vraiment bonne et charismatique. Claude Jarman Jr. en tant que Jamie Groves est touchant et sincère en tant que jeune homme inexpérimenté plongé dans cette guerre fratricide après le meurtre de sa famille par les tuniques bleues. Richard Denning pour Lee Kemper est un personnage humain, capable du meilleur comme du pire, à l'image de tous les personnages composants Le relais de l'or maudit.


Lee Marvin en tant que Rolph Bainter soldat confédéré sous les ordres de Stewart est excellent. Un soldat instable et fatigué présenté tel un chien fou sauvage. Randolph Scott et Lee Marvin nous offrent un bon combat au corps-à-corps spectaculaire dans lequel les deux hommes ne s'épargnent pas. Le cinéaste braque obsessionnellement sa mise en scène, sur les changements impulsifs de Marvin, mais aussi sur les otages gravitant autour des confédérés tous confiné dans un relais avec les confédérés suite à une attaque pour l'or. Les comédiennes Donna Reed et Jeanette Nolan sous les traits de Molly Hull et Mme Margaret offrent pas mal de nuance et d'ambivalence avec des rôles pleins de haines et de ressentiments vis-à-vis des confédérés. Un mélange de personnages nuancée, complexe et stupéfiant entraînant avec lui son lot de conséquences. Une intensité dramatique alimentée par une bonne psychologie sous un jeu de dupes où de nombreux retournements viennent à chaque fois complètement inverser le rôle du méchant.


Le relais de l'or maudit est un western visuellement impressionnant avec de superbes plans en technicolor avec une maîtrise de l'environnement particulièrement réussit. Certaines séquences sont habilement mis en valeur comme durant la confrontation finale se passant durant une nuit orageuse sous un torrent de pluie offrant de belles images signées Charles Lawton Jr. Une ultime scène de siège visuellement réussit et imprégnée grâce à une tension palpable qui permet à la mise en scène de survivre et de s'épanouir. Une confrontation finale malheureusement un peu trop hâtive et rapidement expédié qui heureusement reste un spectacle satisfaisant. La séquence d'ouverture est nerveuse et dynamite dans tous les sens pour s'enchaîner sur une grosse course-poursuite à diligence offrant un lot d'action intensive pour finalement s'achever sur une prise d'otages qui va se transformer en petit huis clos, où les tensions dramatiques et psychologiques vont trouver tous leurs intérêts malgré une petite perte de rythme. À ne pas en douter, Roy Huggins tente par le biais de son premier et unique long métrage d'arpenter de nouveaux territoires visuel et narratif et ose mettre en péril sa fragile position de nouveau cinéaste sur l'hôtel d'une croyance absolue dans l'intelligence et la capacité d'adaptation du spectateur face à un western qui va moduler son genre à trois reprises, avec un western d'action énergique impressionnant, un huis clos, et un film noir.


CONCLUSION :


Le relais de l'or maudit est un western réalisé par Roy Huggins, qui présente une intrigue mettant en avant un récit solide et nuancé malgré quelques petites fautes de goût. Les comédiens sont impressionnants avec en tête Randolph Scott, Lee Marvin, Claude Jarman Jr., Jeanette Nolan et Donna Reed qui sont convaincants et possessifs. Un film qui avait tout pour devenir une œuvre importante, mais qui n'a pas su pleinement tirer toutes ses forces malgré l'investissement évident du cinéaste. Le western que nous offre Roy Huggins n'est pas parfait mais offre tout de même un récit dramatique, nerveux, simple et efficace qui fait qu'on se prend dans cette histoire et qu'on se laisse embarquer jusqu'au bout.


Faut bien avouer que Randolph Scott et Lee Marvin dans un même film, ça a de la gueule.

Créée

le 20 août 2021

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