Comme le signalait à juste titre une de mes éclaireuses, les 8 Salopards est un film éminemment couillu.
Couillu et bavard par dessus le marché. Incroyablement bavard. Mais dans le bon sens du terme.
En un mot, tarantinesque !
Un pétage de plombs des familles en guise de feu d'artifices pour le réalisateur américain.


Avec ce film à la mise en scène parfaitement maitrisée, Tarantino (qui n'avait de toute façon plus rien à prouver en la matière) nous livre un divertissement comme il en a le secret, riche en personnages et en hémoglobine. Mais un divertissement doublé d'une réflexion à multiples points de vue sur le cinéma. Et c'est ce dernier aspect qui m'a paru le plus intéressant.
Lorsque Warren ( Samuel Jackson) raconte au vieux général sudiste les derniers outrages qu'il a fait subir à son fils, le vieux se fait un film avec les paroles qu'il entend. Nous sommes, nous spectateurs, enclins à ne pas prendre comme argent comptant la version grand-guignolesque de Warren mais le vieux, lui, marche à fond. Et dégaine ! Ce qui lui sera fatal. Le pouvoir des mots ! Un grand classique chez Tarantino le raconteur d'histoires.


De même, le cinéaste joue avec finesse sur le champ et le hors-champ.
Le décor (champ spatial) tient en un seul espace. Une auberge fermée sur elle-même - à coups de marteau. Un huis clos où tout se joue sur les planches comme sur une scène de théâtre. Hors champ, sous les planches, le 8ème salopard, planqué dans le sous-sol. Ou encore cette main - shakespearienne - qui verse le poison à nouveau hors champ.
Ruptures temporelles : le présent (le champ de la narration) est celui de la tempête de neige qui enferme pour quelques heures les personnages les uns avec les autres. Hors champ temporel : ce qui s'est passé AVANT. Dont on ignore tout jusqu'à ce que cela nous soit révélé. On découvre alors le revers des personnages. Les masques finissent par tomber. Et le film que nous nous étions fait s'avère finalement faux. Faux comme le film que se fera John Ruth (Kurt Russell) à propos de la lettre de Lincoln à Warren.
Un grand film sur l'art de raconter des histoires.


Seul bémol à mes yeux, la fin, que je ne trouve pas à la hauteur du reste du film ni d'ailleurs très "lisible".
Comme si l'impuissance - au deux sens du terme - à laquelle sont réduits les deux derniers protagonistes avait déteint sur le talent narratif du réalisateur et finit par castrer son incroyable pouvoir d’imagination.


Personnages/interprétation : 9/10
Scénario/histoire : 8/10
Mise en scène/réalisation : 9/10


8.5/10

Créée

le 3 mai 2016

Critique lue 405 fois

20 j'aime

13 commentaires

Theloma

Écrit par

Critique lue 405 fois

20
13

D'autres avis sur Les 8 Salopards

Les 8 Salopards
KingRabbit
8

Peckinpah Hardcore

Le film va diviser... Encore plus que d'habitude pour du Tarantino, mais sur le plan moral essentiellement, là où les précédents Tarantino décevaient également sur la forme, avec des films...

le 25 déc. 2015

259 j'aime

26

Les 8 Salopards
Sergent_Pepper
7

8 hommes en polaires

On pourrait gloser des heures sur chaque nouvel opus de Tarantino, attendu comme le messie par les uns, avec les crocs par les autres. On pourrait aussi simplement dire qu’il fait des bons films, et...

le 9 janv. 2016

206 j'aime

31

Les 8 Salopards
Velvetman
8

Oh, you believe in Jesus now, huh, bitch? Good, 'cause you gonna meet him!

Crucifiée, les yeux tournés vers une terre enneigée, une statue christique enclavée au sol observe de loin cette Amérique qui subit les cicatrisations cathartiques du clivage des contrées du Nord...

le 6 janv. 2016

143 j'aime

20

Du même critique

Us
Theloma
7

L'invasion des profanateurs de villégiature

Avec Us et après Get Out, Jordan Peele tire sa deuxième cartouche estampillée "film d'horreur". Sans vraiment réussir à faire mouche il livre un film esthétiquement réussi, intéressant sur le fond...

le 21 mars 2019

107 j'aime

33

Ad Astra
Theloma
5

La gravité et la pesanteur

La quête du père qui s’est fait la malle est un thème classique de la littérature ou du cinéma. Clifford (Tommy Lee Jones) le père de Roy Mac Bride (Brad Pitt) n’a quant à lui pas lésiné sur la...

le 18 sept. 2019

97 j'aime

55

Life - Origine inconnue
Theloma
7

Martien go home

Les films de série B présentent bien souvent le défaut de n'être que de pâles copies de prestigieux ainés - Alien en l’occurrence - sans réussir à sortir du canevas original et à en réinventer...

le 21 avr. 2017

81 j'aime

17