"Celui qui désire mais n'agit point engendre la peste..."

Un beau jour ensoleillé de printemps 96, John Leguizamo se remate sa petite filmographie et se dit qu’à part de petits rôles de gangsters, il n’a pas encore brillé : il s’est fait arnaquer sur Super Mario Bros., remarquer de plus belle sur Extravagances et vient à peine d’en faire des caisses sur le tournage de Spawn, dévoilant ses talents insoupçonnés entremêlant grimaces et blagues scato. Mais John n’a pas encore de film solo, où c’est lui LA star. Voilà qu’il se penche dès lors sur l’écriture d’un personnage inédit, une copie conforme de Jim Carrey (après tout, lui aussi cartonne au box-office en grimaçant à outrance).


Sauf que John n’est pas scénariste, il lui faut donc transmettre sa foule d’idées à un vrai gars du métier, un gars comme son pote David Bar Katz. Tous deux ont déjà bossé ensemble sur "House of Buggin'" où John faisait le pitre à travers des sketchs pas très drôles. Mais il y a eu un petit audimat, c’est bon signe. Et puis pour mettre en scène tout ça, il faut aussi un professionnel mais pas trop cher non plus, un type de la télé c’est très bien. Mais ce qu’il faut surtout, c’est vraiment faire comme Jim Carrey : des grimaces.


L’histoire on s’en tamponne, ce qu’il faut c’est des grimaces, pour faire rire le public. Le script est pondu en trois jours par David, livré à la production sur un joli post-it rose : ça raconte comment un arnaqueur endetté va accepter d’être la proie d’une chasse à l’homme afin de toucher une grosse somme d’argent. Comme le film avec Van Damme mais en plus drôle, avec un personnage antipathique, débile, infatigable, ce genre de protagoniste qui en fait des tonnes pour pas grand-chose. Et puis les gags, faut vraiment y aller à fond dans l’outrance : les blagues racistes, les blagues scato, les blagues antisémites, les blagues homophobes, les blagues sur les aveugles, les blagues sans chute… Comme ça le spectateur y trouve son compte (pas bête la guêpe !).


Du coup, le film fait un méga flop au box-office et sort même en France en vidéo dans un titre aussi débile que le script. Pourtant il y avait de quoi se fendre la poire : dès la scène d’intro John fait une reprise de "Rapper’s Delight" sous la douche et montre le ton du film : raciste, scato, antisémite, homophobe, sans chute. Tout un programme. Tout le casting semble exténué par l’exubérance jamais drôle, voire très très lourde de John, ce pauvre Jeffrey Jones en premier, embarqué dans cette galère pour toucher un maigre chèque en sempiternel bad guy ici germanique avec comme unique consigne : bien appuyer très fort sur l’accent allemand.


Donc The Pest n’est pas la consécration pour John. Il se rappelle cette journée ensoleillée de 1996 en se disant que le premier rôle c’est peut-être pas son fort, qu’un bon scénario ça aide, que les blagues ont peut-être besoin d’une chute, qu’une mise en scène comique n’a pas forcément besoin d’accélérer des séquences à la Benny Hill et que faire tournoyer la caméra pour faire une transition ça ne marchait que dans la série "Batman" des sixties. Bref, John continua les seconds rôles plus ou moins marquants et traça sa route, son petit bonhomme de chemin, sa destinée.

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Créée

le 18 juin 2020

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